Dix conseils pour gérer les incivilités et les comportements agressifs

11 septembre 20237 min

Grégory Poppe, responsable Formations opérationnelles sûreté-malveillance à CNPP, nous livre ses astuces pour faire face au mieux aux incivilités et aux actes agressifs.

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Maîtriser sa communication

Pendant une conversation, les modes de communication se complètent mutuellement. Le déficit de communication entraîne l’agressivité. Il est donc indispensable de maintenir un lien. En bloquant la communication, on augmente le risque.

Il existe trois modes de communication, plus ou moins importants pour l’information émise :

  • le verbal (7 %) : ce que l’on dit, ce que l’on entend (paroles, sens des mots utilisés, reformulation, questionnement…) ;
  • le para-verbal (38 %) : la manière de s’exprimer (voix, débit, élocution, ton, silences/pauses…) ;
  • le non-verbal (55 %) : l’image que l’on renvoie (attitude, gestes, tenue, position, écoute, sourire, regard, expressions du visage…).

Recommandations de Grégory Poppe. En cas de conflit, il est conseillé à l’agent de sécurité d’arriver par le côté, et non de face en confrontation. Les bras croisés, les jambes écartées peuvent être interprétés comme une position de défi. Se frotter les mains peut par exemple être un signe de stress. Pour éviter cela, dans certaines situations, il peut être possible de mettre une main dans la poche afin de cacher les gestes parasites.

2

Bien gérer l’espace

Maîtriser les distances de communication, de confort, de sécurité et interdire l’accès à sa zone intime (garder une distance de sécurité).

Recommandations de Grégory Poppe. Se placer ou rester derrière le comptoir pour maintenir ou créer cette distance, tenir une feuille, un calepin devant soi pour agrandir son cercle intime. Faire des gestes devant soi en parlant, cela créera naturellement une distance. Se placer dans le champ des caméras permettra par ailleurs de capter des preuves.

3

Connaître ses propres facteurs déclenchants

Les attaques verbales offensives peuvent porter sur le cadre social, les origines, la famille, les valeurs, le physique… Pour éviter l’escalade de la violence, il faut savoir rester maître de soi malgré la charge agressive.

Recommandations de Grégory Poppe. Il est nécessaire de connaître ses propres limites afin d’anticiper d’éventuelles mauvaises réactions (affrontement dans une situation dangereuse par exemple). Cela permet notamment de déterminer quand passer la main à un collègue par exemple.

Il est nécessaire de connaître ses propres limites afin d’anticiper d’éventuelles mauvaises réactions. Cela permet notamment de déterminer quand passer la main à un collègue.

Grégory Poppe
Responsable Formations opérationnelles sûreté-malveillance à CNPP

Grégory Poppe

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Conserver une attitude professionnelle

Développer des comportements souples et adaptés aux situations et à l’interlocuteur. Il faut rester calme et poli, mais ferme. Utiliser des mots simples et répéter les explications si nécessaire. Inviter à poser des questions.

Ignorer les insultes et les défis adressés, ce n’est pas personnel.

Accepter sa part de responsabilité. Connaître sa marge de manœuvre et faire connaître ses limites d’intervention.

Recommandations de Grégory Poppe. Rester intègre et ne jamais mentir. Il ne faut pas briser la confiance. Si vous mentez, l’agresseur pourrait revenir se venger par la suite.

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Repérer les signaux d’agressivité

Ceux de l’agresseur et les siens. Trouver des recours personnels pour s’en protéger sans rompre la communication et maintenir néanmoins une distance de sécurité.

Manifestations actives Gestuelles Expression, regard, mimique, posture, crispation, pâleur, rougeur, instabilité, coups, blessures, bris d’objet, mutilation, passage à l’acte
Verbales Injures, ironie, cynisme, cris, intonation, provocation, jugement de valeur, médisance, vulgarité, menaces, critique
Manifestations passives Gestuelles Opposition, rigidité, indifférence, tremblements
Verbales Mutisme, refus de répondre, non-dit, sous-entendus

Recommandations de Grégory Poppe. Repérer les signaux envoyés par le corps et l’esprit pour éviter les débordements, la propagation, la contamination, l’épuisement des réserves et le point de rupture.

6

Casser le cercle vicieux de l’agressivité et éviter l’escalade

Le triangle de Karpman est un schéma à la base de jeux psychologiques de manipulation de la communication. Selon ce schéma, si une personne utilise l’un de ses rôles, elle entraîne l’autre à jouer un rôle complémentaire. Les protagonistes adoptent ces rôles plutôt que d’exprimer leurs idées et émotions.

Victime
Se plaint, subit, apitoie

Sauveur
Ne peut s’empêcher d’aider, intervient même si on ne lui demande rien
Triangle de Karpman
Persécuteur
Dévalorise, critique, ironise

Recommandations de Grégory Poppe. Il ne faut pas entrer dans ce schéma mais se placer en médiateur. Essayer de trouver une solution gagnant-gagnant comme :

  • savoir se taire, écouter l’autre, ne pas lui couper la parole ;
  • avoir un ton calme et posé, ne pas crier ;
  • maintenir les marques de respect (M., Mme, le vouvoiement) ;
  • ne pas toucher la personne ;
  • se centrer sur les faits objectifs et non sur les émotions ;
  • proposer une compensation, un avantage, une solution.

7

Évitez les termes « barbelés »

Ne pas utiliser de phrases infantilisantes, ne pas donner d’ordre ou de conseil, ce qui ne ferait qu’aggraver la situation. « Réfléchissez deux secondes », « Soyez raisonnable », « Calmez-vous », « problématique », « règlement », « point » pour terminer une phrase : tous ces termes sont à bannir. L’agresseur cherche le faux pas, le déclenchement du feu vert pour agresser.

Recommandations de Grégory Poppe. Utiliser des phrases « pansement ». Il faut absorber et renvoyer : « C’est votre façon de voir, que puis-je faire pour vous ? », « Ces propos n’appartiennent qu’à vous… », « C’est votre point de vue, est-ce que je peux vous aider ou j’appelle l’un de mes collègues ? »

8

Si la situation est dangereuse, alerter rapidement des collègues,
le manager ou le service sécurité…

Il faut tenir compte de « l’effet tunnel » dû au stress : pour l’auteur comme pour la victime, le champ visuel est réduit, la perception des sons est moins bonne. Il faut bouger lentement et bien articuler.

Ne pas forcer physiquement la personne à partir, ne pas la retenir si elle part.

Toujours avoir un point de fuite (ne pas se mettre en rempart entre l’agresseur et des biens). Sortir dès que possible.

Recommandations de Grégory Poppe. En amont, il faut définir des codes. Un manager qui voit un membre de son équipe dans une situation conflictuelle pourra par exemple intervenir : deux doigts sur l’épaule de son salarié pour qu’il sorte de l’effet tunnel, puis « Je vais prendre le relais, on se voit à 17 h », le 17 étant un code pour prévenir la police. Ou un « Sylvain t’attend en réserve » peut signifier je prends le relais, préviens les secours. Il faut anticiper les scénarios en amont.

9

Savoir lâcher prise

Nous avons tendance à défendre nos valeurs mais il faut accepter les valeurs des autres et savoir lâcher prise. Il y a souvent plus à perdre qu’à gagner à tenir tête. Une attaque peut entraîner non seulement des séquelles physiques et donc un arrêt maladie, une activité en mode dégradé, mais aussi des séquelles psychologiques, pour la victime et les collègues témoins, un risque pour l’image

Recommandations de Grégory Poppe. Se voir comme dans un rôle, accepter la dissociation. Ne pas hésiter à dire « Vous avez peut-être raison… ». Dès qu’on sent que cela peut mal se passer, il faut switcher : « Faites ce que vous avez à faire » constitue une échappatoire. Cela ne veut pas dire qu’on va laisser faire impunément, puisqu’on ira porter plainte juste après.

10

Rappeler régulièrement les bonnes pratiques

La formation et la communication sont primordiales.

Recommandations de Grégory Poppe. Lors du quart d’heure sécurité, lors du débrief du matin, il est important de rappeler aux personnels les codes ou mots de passe établis selon les scénarios, la position des issues de secours, des caméras, les bonnes pratiques… Tout ceci en incluant les agents de sécurité.


Article extrait du n° 595 de Face au Risque : « Incivilités : quelles réponses ? » (septembre 2023).

Gaëlle Carcaly – Journaliste

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