Faire face aux incivilités et aux violences

11 septembre 20237 min

Agressions, incivilités, menaces… les actes de violences peuvent être hiérarchisés et déclinés en niveau de gravité.

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DE QUOI PARLE-T-ON ?

Incivilités

Si la notion d’incivilité est variable selon les cultures, les entreprises ou les organisations, elle regroupe l’ensemble des actes et comportements qui manifestent l’ignorance ou le rejet des règles élémentaires de la vie sociale. Il s’agit du refus de la règle collective admise par manifestations de mécontentement. Les personnels en contact avec le public sont particulièrement concernés.

L’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS), dans son guide méthodologique « La prévention des atteintes aux personnes et aux biens en milieu de santé », en donne cette définition :
« Elles sont une véritable nuisance sociale qui gangrène les règles élémentaires de la vie en société et, de façon insidieuse, portent gravement atteinte à la qualité de la vie au travail. Répétitives au point de devenir habituelles, les incivilités peuvent générer chez ceux qui les subissent une accoutumance nocive, destructrice de leur personne et du sens et de l’intérêt de leur travail. L’exposition aux incivilités produit les mêmes effets délétères que la violence : stress chronique, mal-être, perte de confiance, démobilisation des équipes, dégradation de l’ambiance générale, dysfonctionnements, absentéisme. Il est donc primordial de lutter contre cette sorte de harcèlement moral qui mérite la mobilisation de tous. »

Agressivité

Elle découle souvent de la frustration d’un besoin naturel ou d’un besoin de reconnaissance non satisfait. Le terme sous-entend une certaine violence dans la réalisation ou le résultat de son action. Deux profils auxquels faire face : le prémédité (action froide, intentionnelle) et l’impulsif (réaction à l’emportement, spontané).

Violence

C’est une force brutale imposée aux autres par contrainte, intimidation ou terreur.

Conflit

Il n’existe pas sans acteurs : celui qui est insatisfait dans ses besoins essaie de combler sa frustration en la cristallisant sur une ou plusieurs personnes, souvent dans un rapport de force réducteur où il veut être le dominant. Chacun dépend de l’autre, réagit à ses moindres faits et gestes.

Il ne faut surtout pas entrer dans la spirale de l’escalade.

EXEMPLE DE GRADATION DE L’ATTEINTE AUX PERSONNES : CELUI DE L’ONVS

Niveau 1

Injures, insultes et provocations sans menaces (propos outrageants, à caractère discriminatoire ou sexuel), consommation ou trafic de substances illicites (stupéfiants) ou prohibées en milieu hospitalier (alcool), chahuts, occupations des locaux, nuisances, salissures.

Niveau 2

Menaces d’atteinte à l’intégrité physique ou aux biens de la personne, menaces de mort, port d’armes (découverte d’armes lors d’un inventaire ou remise spontanée ou présence indésirable dans les locaux).

Niveau 3

Violences volontaires (atteinte à l’intégrité physique, strangulation, bousculades, crachats, coups), menaces avec arme par nature ou par destination (arme à feu, arme blanche, scalpel, rasoir, tout autre objet dangereux), agression sexuelle.

Niveau 4

Violences avec arme par nature (arme à feu, arme blanche) ou par destination (scalpel, rasoir, couverts, tout autre objet : stylo, lampe, véhicule, etc.), viol et tout autre fait qualifié de crime (meurtre, violences volontaires entraînant mutilation ou infirmité permanente, enlèvement, séquestration, etc.).

LA PRISE EN COMPTE DES INCIVILITÉS ET DU RISQUE AGRESSION

Source : Traité pratique de sûreté malveillance – CNPP Éditions

Prévenir

Formation des personnels et mise en situation, explication des consignes et procédures, échanges avec les collègues et la hiérarchie, information du public, accueil, conception des lieux…

Cela passe également par la communication verbale et visuelle d’accueil. Bien aménager l’espace : accueillant pour l’utilisateur régulier, l’espace doit être dissuasif pour l’utilisateur abusif.

Détecter

Situations délicates, périodes difficiles, personnes déjà identifiées, signaux de passage à l’acte

Certaines phases de la vie d’une organisation (négociations de salaires, mouvements sociaux, agression récente, accident du travail perturbant, contexte économique tendu, période de licenciements fréquents…) peuvent influer sur le moral et les comportements des salariés ou même des usagers extérieurs, par contagion. Ces périodes peuvent entraîner démotivation, heurts fréquents, agacement, laisser-aller… Le service de sûreté est souvent bien placé pour ressentir les prémices d’une telle crise.

Il est par ailleurs nécessaire d’échanger régulièrement avec les forces de l’ordre.

Gérer

Adopter une communication adaptée, une attitude professionnelle, un positionnement dans l’espace et le temps, gérer le stress, alerter si besoin, passer le relais à un tiers…

Un agresseur potentiel a le choix entre trois possibilités : attaquer, se retirer, trouver un compromis. Le personnel en contact avec lui peut, par son attitude et ses paroles, l’influencer dans ce choix (lire aussi notre article « Dix conseils pour gérer les comportements agressifs »).

Protéger

Se protéger soi-même et les tiers, alerter puis se retirer, ou inversement, se défendre uniquement en cas d’agression physique et de retrait impossible…

Traiter

Communication, soutien médical, psychologique, juridique, social, analyse de l’événement pour en dégager les causes et agir en amont…

En cas de menaces ou violences, la réponse institutionnelle est le dépôt de plainte. Pour rappel, une main courante est une simple information à la Police, sans suite judiciaire obligatoire, mais cela permet une traçabilité des faits. Déposer une plainte déclenche l’action publique auprès de la Police ou de la Gendarmerie et entraîne l’information du parquet et la recherche des auteurs.

DROIT : LES MARGES DE MANŒUVRE POUR LES PERSONNELS

Est qualifié de crime ou délit flagrant le crime ou le délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre. Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d’objets, ou présente des traces ou indices laissant penser qu’elle a participé au crime ou délit.

Dans les cas de crime flagrant ou délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche (le maire est OPJ).

Elle permet de se défendre ou de protéger quelqu’un ou un bien, lors d’une attaque immédiate par une personne. Pour que la légitime défense existe, l’agression doit être :

  • actuelle : le danger est imminent, il n’est ni prévu, ni prévisible ;
  • injustifiée : elle ne résulte pas d’un état de légitime défense, ni d’un état de nécessité ;
  • réelle : agression physique ou tentative, menace au contact, vol sur la personne, atteinte à la liberté physique.

La défense doit être :

  • nécessaire : aucun autre moyen de se soustraire au danger ;
  • simultanée : immédiate par rapport à l’agression (dans le même temps) ;
  • proportionnelle à la gravité de l’attaque.

En rouge, des exemples de peines renforcées.

Dommage subi par la victime Peine encourue
Injure privée Contravention de 38 € maximum. Cette somme peut aller jusqu’à 1 500 € en cas de propos discriminatoires
Injure publique 12 000 € d’amende. Si les propos sont discriminatoires : 1 an d’emprisonnement et 45 000 € d’amende
Menace de commettre un crime
ou un délit
6 mois d’emprisonnement et 7 500 € d’amende
3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende
Menace de mort 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende
5 ans et 75 000 € d’amende
Violences volontaires sans aucune lésion ou blessure 750 € d’amende
Violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) d’une durée inférieure ou égale à 8 jours 1 500 € d’amende (3 000 € en cas de récidive)
3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende (même sans ITT)
Violences volontaires ayant entraîné une ITT de plus de 8 jours 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende
5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende

Les personnes exerçant une activité privée de sécurité mentionnée aux articles L.611-1 ou L.621-1 du code de la sécurité intérieure, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur, bénéficient désormais, dans l’exercice de leurs fonctions de la même protection que les professionnels de santé et les personnes chargées d’une mission de service public en cas de violence (art. 222-13 du code pénal) et de menace de commettre un crime ou un délit proférées contre les personnes ou les biens (art. 433-3 du code pénal).


Article extrait du n° 595 de Face au Risque : « Incivilités : quelles réponses ? » (septembre 2023).

Gaëlle Carcaly – Journaliste

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