Les enjeux de la prévention des TMS

9 décembre 20217 min
travail de chantier - travailleur ayant une douleur dans la nuque - Crédit : Friends-Stock-AdobeStock-scaled

Santé au travail. Près de 9 maladies professionnelles sur 10 sont dues à des troubles musculo-squelettiques
(TMS), avec une tendance à la hausse depuis 2018. Ces troubles de l’appareil locomoteur se manifestent par des
douleurs et des gênes dans les mouvements susceptibles d’entraîner, à terme, une incapacité au travail et dans la
vie quotidienne. La prévention s’avère indispensable.

Définition

Les troubles musculo-squelettiques (TMS) sont l’un des problèmes de santé liés au travail les plus répandus en Europe. Devant cette déferlante, l’EU-Osha, l’agence d’information de l’Union européenne pour la sécurité et la santé au travail, a choisi d’en faire sa campagne de sensibilisation 2020-2022.

En effet, depuis 1989, ils sont en France la première cause de maladies professionnelles1 indemnisées : 88 % des maladies professionnelles sont des TMS. Et la statistique est inférieure à la réalité puisque de nombreux cas de TMS ne sont pas déclarés. L’InVS (Institut de veille sanitaire – devenue Santé Publique France en 2016) avait estimé, dans une étude datant de 2011, entre 53 % et 73 % les sous-déclarations.

En 2019, on note une hausse importante des TMS dans les activités de services et une baisse dans le BTP (voir tableau ci-dessous).

Les TMS regroupent des affections se situant près des articulations. Ils peuvent toucher les muscles, les tendons, les ligaments, les nerfs, les vaisseaux sanguins, les bourses séreuses (poches plates contenant le liquide articulaire dit liquide synovial) et les cartilages.

L’activité professionnelle prend une place importante dans l’apparition ou l’aggravation de ces troubles qui sont accompagnés de douleurs, de raideurs et de gênes fonctionnelles (préhension ou mouvements difficiles à réaliser). En outre, ils peuvent devenir irréversibles, voire entraîner un handicap, d’où l’importance d’un diagnostic rapide.

Certaines activités professionnelles physiques et biomécaniques et certains environnements de travail sont plus propices à l’apparition de TMS:

  • manutentions manuelles de charges;
  • postures inconfortables;
  • vibrations mécaniques;
  • mouvements répétitifs;
  • manque de lumière;
  • environnements froids;
  • travail sur écran;
  • position assise ou debout prolongée…

Cependant, les facteurs psychosociaux et les contraintes organisationnelles jouent également un rôle dans l’apparition de ces troubles:

  • forte charge de travail;
  • faible autonomie;
  • absence de pauses ou de possibilités de changer de posture de travail;
  • travail à un rythme accéléré;
  • longues journées;
  • travail posté;
  • intimidation;
  • harcèlement;
  • discrimination;
  • manque de satisfaction professionnelle…

En effet, le stress et la fatigue qui en découlent rendent le travailleur plus sensible aux risques de TMS.

Historique de la reconnaissance des TMS

Les premiers TMS sont reconnus en 1972, avec la création du tableau n° 57 des maladies professionnelles du régime général de la Sécurité sociale dédié aux affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail.

En 1980, ce sont les affections provoquées par certaines vibrations et chocs qui sont prises en compte avec le tableau n° 69.

Et cinq années plus tard, en juin 1985, ce sont les lésions chroniques du ménisque à caractère dégénératif qui font l’objet d’une reconnaissance (tableau n° 79).

Enfin, le 15 février 1999, apparaissent les tableaux n° 97 et n° 98 relatifs à certaines affections chroniques du rachis lombaire créées par les vibrations ou la manutention de charges lourdes.

Ces cinq tableaux recensent les types de maladies et les principaux travaux susceptibles de les provoquer et indiquent un délai de prise en charge. À noter que le régime agricole bénéficie lui aussi de cinq tableaux de maladies professionnelles relatifs aux TMS.

La démarche de prévention

Comme l’indique l’article L.4121-1 du code du travail, l’employeur doit prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ». Il doit donc mettre en place des actions et prendre des dispositions pour prévenir les risques professionnels (article L.4161‑1).

En outre, les TMS ont des répercussions économiques et sociales non négligeables pour les entreprises car ils génèrent des baisses de productivité, de l’absentéisme et des coûts d’indemnisation.

Afin d’aider les entreprises dans leur démarche de prévention des risques TMS, de nombreux outils existent. L’Assurance maladie-Risques professionnels a développé en 2014 « TMS Pros », une offre de service mise à la disposition des entreprises (qui a fait, depuis, l’objet de plusieurs ajustements notamment concernant les lombalgies). Ce programme se décline en quatre grandes étapes :

  • Suis-je concerné ? Il s’agit tout d’abord d’établir un état des lieux des situations et des pratiques dans l’entreprise en recueillant les données portant sur les atteintes à la santé du personnel et qui ont un impact sur la performance de l’entreprise. Ces indicateurs sont à rassembler dans un tableau de bord.
  • Par quoi commencer ? Il faut dépister les situations de travail présentant le plus grand risque de TMS. Pour cela, il est nécessaire de s’appuyer sur une personne ressource. Il faut donc en amont identifier les compétences internes à l’entreprise, ou externes en se faisant aider par un professionnel.
  • Quels résultats pour l’entreprise ? Une analyse des situations prioritaires doit être réalisée. Elle s’effectue par des entretiens et par l’observation des travailleurs à leur poste de travail et conduit à la mise en place d’un plan d’actions prioritaires.
  • Quels résultats pour l’entreprise ? Enfin, il faut évaluer les mesures mises en place en mettant à jour le tableau de bord, et effectuer un bilan.
homme travaillant au bureau - douleur épaule - Andrey Popov-AdobeStock
Les TMS ont des répercussions économiques et sociales non négligeables pour les entreprises car ils génèrent des baisses de productivité, de l’absentéisme et des coûts d’indemnisation.

Mais quelle que soit la méthode utilisée, pour être menée à bien une démarche de prévention nécessite une mobilisation de tous les salariés de l’entreprise et un engagement ferme de la direction.

Les solutions

Selon les causes de TMS identifiées, différentes actions peuvent être menées. Par exemple :

  • adopter les outils d’aide à la manutention et réduire les charges lourdes ;
  • choisir des machines moins vibrantes ;
  • aménager les postes de travail, adapter la hauteur des bureaux, des chaises et autres mobiliers en fonction du type de tâches à accomplir ;
  • alterner les tâches pour que le salarié alterne les gestes ;
  • ralentir les cadences ;
  • mettre à disposition des équipements qui amortissent les pressions sur les articulations (genoux) ;
  • favoriser l’entraide ;
  • diminuer les facteurs de stress ;
  • favoriser les pauses collectives pour éviter l’isolement, encourager les temps d’échanges mais aussi pour se dégourdir les jambes ou prendre l’air ;
  • valoriser les compétences.

Les industriels rivalisent d’ingéniosité pour développer des innovations techniques qui permettent d’améliorer les conditions de travail des salariés et protéger leur santé. Elles vont des appareils de levage, aux exosquelettes en passant par les chaises ergonomiques.

Pour investir dans des solutions adaptées et aider à financer de nouveaux matériels et des formations, l’Assurance maladie-Risques professionnels propose aux entreprises de moins de 50 salariés des subventions :

  • TMS Pros Diagnostic pour participer au financement de la formation, de l’évaluation et la mise en place d’un plan d’actions;
  • et TMS Pros Action pour l’achat de matériel et d’équipements.

Les conséquences des TMS sont préjudiciables aussi bien pour les entreprises que pour les travailleurs. Ainsi, leur prévention « nécessite une prise en compte globale qui s’inscrit dans la vie de l’entreprise et dans la durée », tel que l’affirme l’INRS.

1) Une maladie est professionnelle si elle est la conséquence directe de l’exposition d’un travailleur à un risque physique, chimique ou biologique, ou si elle résulte des conditions dans lesquelles le travailleur exerce son activité professionnelle, et si elle figure dans l’un des tableaux du régime général ou du régime agricole de la Sécurité sociale.


Article extrait du n° 571 de Face au Risque : « Troubles musculo-squelettiques : réalités et prévention » (avril 2021).

Martine POREZ

Martine Porez
Journaliste

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