L’Anses recommande d’ajouter la friture aux procédés de travail cancérogènes

25 octobre 20244 min

Dans un avis et un rapport publiés le 18 juin 2024, l’Anses préconise de reconnaître “les travaux exposant aux émissions de friture avec des graisses animales ou végétales” comme un procédé cancérogène.

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En 2017, l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a été saisie par la Direction générale du travail afin d’identifier de nouveaux éléments à inscrire à la liste des procédés cancérogènes, définis par l’article R4412-60 du Code du travail. De cette saisine a découlé une série d’études, qui s’est achevée en juin 2024 avec un rapport, passé inaperçu, sur le risque de cancer par exposition aux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) lors de travaux exposant aux émissions de friture avec des graisses animales ou végétales.

L’arrêté du 26 octobre 2020 reconnaît déjà comme cancérogènes les travaux exposant aux HAP présents dans la suie, le goudron, la poix, la fumée ou les poussières de la houille. Il ne fait en revanche pas mention des HAP liés aux fritures. Pourtant, d’après l’INSEE, citée dans le rapport de l’Anses, plus de 1 400 000 personnes étaient salariées fin 2021 dans les secteurs de la restauration ou des industries alimentaires en France.

Une liste de recommandations

Se basant sur plusieurs études, principalement menées en Asie, l’Anses émet donc aux autorités une liste de recommandations, dont la principale est la reconnaissance des travaux exposant aux émissions de friture avec des graisses animales ou végétales comme un procédé cancérogène.

Les experts préconisent également :

  • d’informer le personnel exposé aux émissions de friture sur le risque cancérogène ;
  • de mettre en place et d’entretenir un système de captage des émissions de friture adapté et efficace ;
  • de vérifier régulièrement la qualité des huiles afin de les renouveler lorsque nécessaire et d’appliquer les bonnes pratiques visant à limiter l’enrichissement des huiles en HAP par dégradation (limitation de la température de chauffe, filtration après utilisation, etc.) pour minimiser les émissions de HAP lors de leur utilisation ;
  • d’informer et de former les employeurs au risque cancérogène et à la prévention des risques liés aux émissions de friture avec des graisses animales ou végétales ;
  • de mener des campagnes de mesure d’exposition aux composés émis lors de fritures représentatives des pratiques culinaires occidentales, et notamment aux HAP ;
  • de prendre en compte les expositions aux émissions de friture dans la prochaine enquête SUMER (Surveillance médicale des expositions des salariés aux risques professionnels) ;
  • de mener des études épidémiologiques afin de pouvoir mieux évaluer la cancérogénicité des émissions de fritures représentatives des pratiques culinaires occidentales ;
  • de mettre en place des dispositions réglementaires pour une caractérisation adaptée de la teneur en HAP des huiles usagées et régénérées (recyclées) et d’élaborer les règles de classification et d’étiquetage correspondantes ;
  • d’évaluer la cancérogénicité des huiles minérales usagées (autres que celles « qui ont été auparavant utilisées dans des moteurs à combustion interne pour lubrifier et refroidir les pièces mobiles du moteur ») et des huiles minérales régénérées (recyclées).

Protéger l’environnement

Outre ces recommandations axées sur la santé des travailleurs, les experts préconisent également, dans une optique de préservation de l’environnement, la mise en place par les pouvoirs publics d’un système de collecte systématique des huiles de friture usagées, quelles que soient les quantités produites. L’agence note qu’il existe déjà une disposition légale, prévue par l’article R. 543-225 du Code de l’environnement, mais que celle-ci ne s’impose qu’aux producteurs ou détenteurs d’huiles alimentaires usagées en produisant plus de 60 litres par an. L’Anses veut ainsi aller plus loin, et pousser les autorités à agir pour que soient prises en charge les huiles usagées, y compris lorsque leur quantité est inférieure à 60 litres par an.

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Camille Hostin – Journaliste

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