Métiers à haut risque : le point de vue des inspecteurs du travail de l’UE

5 septembre 20235 min

L’Agence européenne de santé et sécurité au travail (Eu-Osha) a mené une enquête auprès du Comité des hauts inspecteurs du travail afin d’identifier les professions et les secteurs d’activité les plus à risques dans l’Union européenne (UE). Basés sur la perception des inspecteurs du travail, les résultats de cette enquête corroborent les connaissances et les chiffres déjà acquis, avec quelques précisions supplémentaires.

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La transformation des conditions de travail est marquée par l’apparition de nouveaux métiers, de nouvelles technologies et de nouvelles façons de travailler. De façon concomitante, elle s’accompagne également de risques émergents.

Dans ce contexte, l’objectif de l’enquête menée par l’Eu-Osha a été d’interroger la réalité des métiers à haut risque dans l’Union européenne, telle qu’elle est perçue par les professionnels des relations de travail que sont les inspecteurs du travail. Ceci afin de confronter les résultats obtenus avec le savoir scientifique et les statistiques de l’accidentalité connus, tout en détectant éventuellement de nouvelles tendances.

L’enquête de l’Eu-Osha, une initiative inédite au niveau européen, s’est déroulée auprès des inspecteurs du Senior labour inspectors committee (CHRIT en français – Comité des hauts inspecteurs du travail) au cours de l’année 2021 sur la base d’un questionnaire.

Les résultats collectés sont basés sur les réponses de 2096 inspecteurs du travail de l’UE.

Professions à haut risque : ouvriers qualifiés du bâtiment, conducteurs de machines, manoeuvres

Le questionnaire portant sur les professions était basé sur la classification internationale type des professions (CITP-08), qui facilite les comparaisons entre pays depuis 1958.

Trois grands corps de professions arrivent en tête des métiers les plus à risques selon les inspecteurs du travail de l’UE :

  • « Métiers qualifiés de l’industrie et de l’artisanat » (catégorie 7) : 34,4 %
  • « Conducteurs d’installations et de machines, ouvriers de l’assemblage » (catégorie 8) : 25,82 %
  • « Professions élémentaires » (catégorie 9) : 22,70 %. Cette catégorie recouvre notamment les manœuvres et les aides au ménage.

Dans une moindre mesure, les « agriculteurs et ouvriers qualifiés de l’agriculture, de la sylviculture et de la pêche » arrivent en 4e position (9,45 % des répondants). A titre de comparaison, les « militaires » se placent en 7e position des professions les plus risquées sur les 10 de la classification, avec 1,39 % des suffrages exprimés par les inspecteurs du travail.

Le questionnaire adressé aux inspecteurs du travail a tenté d’aller plus loin que les 10 catégories principales, en pénétrant dans les sous-catégories.

Au sein de la catégorie 7, ce sont ainsi les « métiers qualifiés du bâtiment et assimilés, sauf électriciens » (catégorie 71) qui recueillent le plus de réponses (85,01 %). Au sein de cette sous-catégorie, ce sont les « métiers qualifiés du bâtiment (gros oeuvre) et assimilés » (711) qui sont les plus à risques (84 %).

Dans cette sous-catégorie 711 sont notamment classés « les constructeurs de maison, les maçons, les fendeurs et tailleurs de pierre, les constructeurs en béton armé, maçons ragréeurs et assimilés, les charpentiers en bois et menuisiers du bâtiment ».

Au sein de la catégorie 9 – « professions élémentaires », ce sont les « manœuvres des mines, du bâtiment et des travaux publics » (931) qui demeurent les plus exposés (80,99 %) parmi l’ensemble considéré des travailleurs peu qualifiés.

Secteurs d’activité à haut risque : bâtiment, industrie manufacturière, agriculture-pêche

Un deuxième volet du questionnaire a porté sur les secteurs d’activité économique : lesquels sont les plus à risques ? Cette fois-ci, c’est la nomenclature statistique des activités économiques dans la Communauté européenne (NACE Rév. 2) qui a servi de langage commun pour les inspecteurs du travail de l’UE.

Trois secteurs émergent du questionnaire, la « construction » arrivant largement en tête du trio :

  • Construction (secteur F) : 62 %
  • Industrie manufacturière (secteur C) : 13,94 %
  • Agriculture, sylviculture et pêche (secteur A) : 8,46 %

Au sein du secteur de la « construction » (F), c’est sans surprise le sous-secteur « construction de bâtiments » qui apparaît comme le plus exposés (90,34 %), devant « travaux de construction spécialisés » (5,67 %) et « génie civil » (3,99 %).

Au sein de « l’industrie manufacturière », c’est la « fabrication de produits métalliques » (24,29 %) qui apparaît comme le secteur le plus à risques, suivi de la « métallurgie » (18,21 %) et du « travail du bois » (13,93 %)

Les risques pour la sécurité physique en haut de l’échelle

Au sein des deux volets précédents, professions et secteurs d’activité, le questionnaire a porté sur les catégories de risques auxquels les travailleurs étaient les plus exposés dans l’UE (principalement pour les professions et secteurs identifiés à haut risque). Les voici dans leur ordre de priorité (nous vous renvoyons à l’étude pour les détails chiffrés selon chaque volet envisagé) :

  1. Risques pour la sécurité (chute, collision, écrasement, coupure…)
  2. Risques physiques (vibration, bruit, radiation…)
  3. Risques de TMS
  4. Risques chimiques
  5. Risques psychosociaux
  6. Risques biologiques

Niveau de risque selon le statut du travailleur

Des questions ont porté également sur l’exposition aux risques en fonction des différents statuts des travailleurs : intérimaires, permanents, indépendants, non-déclarés, détachés, saisonniers… Des informations croisées avec les professions et les secteurs les plus à risques. L’étude confirme que le statut d’intérimaire est considéré à haut risque par les inspecteurs du travail de l’UE.

Cette enquête a montré que les données remontées par les inspecteurs du travail de l’UE constituent une nouvelle source d’information, qui vient corroborer le savoir existant en santé et sécurité au travail. En effet, « selon Eurostat, souligne l’étude, en 2018 la construction, le transport et le stockage, les secteurs de l’industrie manufacturière et de l’agriculture, de la foresterie et de la pêche représentaient ensemble environ les deux tiers (65,6 %) de tous les accidents du travail mortels et plus des deux cinquièmes (44,3 %) de tous les accidents du travail non mortels ».

En adaptant le questionnaire à l’avenir, il serait éventuellement possible de faire remonter des signaux faibles ou de mettre en évidence de nouvelles tendances pour la santé et la sécurité au travail.

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Bernard Jaguenaud, rédacteur en chef

Bernard Jaguenaud – Rédacteur en chef

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