Fait religieux au travail : le phénomène s’installe
Deux tiers des entreprises françaises sont concernées par l’expression de la religiosité au travail. Le plus souvent, ce n’est pas problématique dans l’organisation, néanmoins les dysfonctionnements liés aux comportements religieux progressent. C’est ce que constate l’Institut Montaigne dans son baromètre 2022-2023 sur le fait religieux.

L’Institut Montaigne a publié en juin 2023 son dernier baromètre du fait religieux en entreprise. Si dans le secteur public, le principe de la laïcité est de mise, dans les entreprises privées, la loi Travail de 2016, dite loi El Khomri, indique que le règlement intérieur peut contenir des dispositions restreignant la liberté religieuse au travail si ces restrictions sont légitimes et proportionnelles (nouvel article L.1321-2-1 du code du travail).
Les entreprises sont certes de plus en plus nombreuses à poser un cadre et à se doter d’outils pour gérer les situations de religiosité pourtant, les dysfonctionnements et les tensions progressent.
Plusieurs éléments marquants sont soulignés dans le baromètre.
État des lieux
2/3
C’est la proportion de répondants ayant déjà connu des situations marquées par le fait religieux dans leur environnement de travail.
23 %
C’est la part des situations délicates à gérer et pesant sur l’organisation, la réalisation du travail et les relations professionnelles. Elles étaient de 22% en 2019/2020 et de 19% en 2018.
Les faits observés
Les faits les plus fréquemment observés sont les demandes d’absence et d’aménagement du temps de travail (26,58%), suivis de près par les signes portés ou présents dans l’espace de travail tels que des bijoux ou images (24,62%). Les ports de signes visibles (foulard, kippa, croix…) représentent 21,28% des situations marquées par le fait religieux.
Les comportements négatifs à l’égard des femmes (refus de travailler avec une femme, sous ses ordres, de traiter une collègue femme comme les collègues hommes, etc.) sont présents dans près de 13 % des situations.
Les religions concernées
76 %
L’islam est la religion la plus représentée dans les situations marquées par le fait religieux. Elle est suivi du catholicisme (20%) puis des cultes évangéliques (16%). Le judaïsme représente environ 12% des situations.
« Pour chaque religion, les faits les plus courants sont les demandes liées aux plannings et au temps de travail et ceux relatifs aux signes religieux », mentionne l’Institut Montaigne.
Tranches d’âge et catégories socioprofessionnelles
46 %
Les salariés les plus concernés par le fait religieux au travail ont entre 26 et 35 ans.
Les 20 à 25 ans représentent 18% des salariés concernés.
40 %
Les employés sont les plus représentés dans les faits religieux, suivi des ouvriers (35%).
« Plus le niveau des qualifications des salariés croyants augmente, moins le fait religieux est présent dans les situations de travail », indique également le baromètre. Il complète en notant que « l’industrie et les secteurs à forte intensité de main d’œuvre (ouvrière et employée) sont les plus concernés : le transport et la logistique, le BTP, la grande distribution, l’environnement, la sécurité, le nettoyage ».
Impact sur l’organisation du travail
La majorité des situations liées au fait religieux n’entraîne pas de dysfonctionnement dans l’organisation du travail.
Néanmoins, la part des situations concernées par un impact négatif augmente régulièrement. Ces situations aboutissent à des tensions et des conflits et nécessitent une intervention managériale (21% des cas en 2022 contre 6% en 2013).
Sanctions prises
12 %
C’est la part des managers confrontés à des tensions ou des conflits qui ont dû prendre des sanctions disciplinaires. Si cette part progresse, elle reste limitée.
Manager le fait religieux
Parmi les outils à la disposition des managers, les quatre dispositifs les plus fréquents sont les suivants :
- dispositions dans le règlement intérieur ;
- consignes particulières répondant aux demandes des managers ;
- discussions sur le sujet lors de réunions de managers ;
- formations.
Le soutien apporté à l’encadrement de proximité par les ressources humaines et les services juridiques est particulièrement déterminant pour gérer une situation difficile.
Méthodologie de l’étude
Enquête réalisée par questionnaire entre fin avril et fin août 2022 auprès d’un échantillon d’environ 25 000 cadres et managers exerçant leur activité en France. 1 148 questionnaires ont été pris en compte dans l’étude. Des entretiens et l’observation de situations réelles ont ensuite été menés.
En savoir plus
Lire également sur ce sujet notre article “La religion dans l’entreprise“.

Martine Porez – Journaliste
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