Risque d’action violente : sensibilisation à l’hôpital Marie-Lannelongue

1 novembre 20205 min
Exercice d’évacuation à l’hôpital Marie-Lannelongue au Plessis-Robinson (Hauts-de-Seine) - Crédit: hôpital Marie-Lannelongue

À l’hôpital Marie-Lannelongue au Plessis-Robinson (Hauts-de-Seine), Rodolphe Temple, alors chef du service de sécurité incendie, doit former et informer les personnels de l’établissement quant à l’évacuation en cas d’incendie. Il a aussi pour mission de les sensibiliser au risque d’action violente.

Depuis novembre 2016, un an après les attentats de Paris et Saint-Denis, chaque établissement de santé doit avoir un plan de sécurisation d’établissement (PSE) intégrant la menace terroriste. Un premier volet, de portée générale, comprend les mesures globales de sécurisation liées à la protection de l’établissement dans la durée et intégrant les mesures du plan Vigipirate. Un second un volet, de gestion de crise, traite des mesures particulières et immédiates de sécurité à mettre en œuvre notamment en cas de survenance d’un attentat.

L’exemple américain

A l’hôpital Marie-Lannelongue, le chef du service de sécurité incendie n’a pas attendu cette obligation pour sensibiliser ses personnels. Quelques mois après les attentats de novembre 2015, il a décidé de leur montrer une vidéo américaine sur le sujet. « Plutôt que de repartir de zéro, j’ai choisi de m’appuyer sur des personnes qui ont l’habitude de ce genre d’action. Une très grande association hospitalière américaine a fait une vidéo de sensibilisation avec des témoignages de personnels administratifs et opérationnels. Je l’utilise pour sensibiliser les personnels de l’établissement. » Le message est le suivant : si on est averti à temps, on évacue, on fuit. Si le créneau est loupé, on se calfeutre, on se confine. Et on se prépare à l’idée d’être trouvé et de devoir se battre pour rester en vie.

Je pense qu’il faut préparer les gens à cette éventualité [combattre]. L’idée n’est pas d’en faire des combattants mais d’expliquer ce qui peut, par exemple, devenir une arme par destination.

Rodolphe Temple
Chef du service de sécurité incendie de l’hôpital Marie-Lannelongue
Rodolphe Temple - Apsighe

Victime ou soignant

« La spécificité est qu’on demande au personnel soignant de partir et d’abandonner les patients, ce qui est contre leur nature et qui va aussi à l’encontre des consignes de transfert horizontal en cas d’incendie, souligne Rodolphe Temple. Il y a un passage assez choquant dans le film où une infirmière dit à un patient de ne pas faire de bruit, de rester là, puis elle le laisse et part. La plupart des soignants réagissent en disant qu’ils ne se voient pas faire ça. Mais quand on leur explique qu’on ne raisonne plus en être humain mais en termes de ressources de soins à préserver pour être redéployés et, qu’au contraire, s’ils restent ils seront des victimes supplémentaires à secourir, ils comprennent et acceptent mieux cette vision pragmatique. »

En se basant sur une vidéo américaine, Rodolphe Temple choisit aussi de sensibiliser ses personnels à une issue possible : devoir combattre. Contrairement aux consignes françaises issues de Vigipirate « s’échapper, se cacher, alerter », aux États-Unis, il s’agit de « courir (run), se cacher (hide), combattre (fight) ». « Je pense qu’il faut préparer les gens à cette éventualité. L’idée n’est pas d’en faire des combattants mais d’expliquer ce qui peut par exemple devenir une arme par destination, selon l’environnement professionnel. Je fais le choix d’oser en parler, ce qui n’est pas un choix partagé par tout le monde. »

Des réalités différentes

En pratique, la vidéo américaine, que Rodolphe Temple a fait sous-titrer, est diffusée au milieu de la formation à la sécurité incendie, entre la partie pratique sur les moyens d’intervention et les exercices d’évacuation ou de transfert horizontal pour mise à l’abri. « J’insiste sur la différence entre l’évacuation incendie et l’évacuation d’urgence en cas d’attentat et sur les différences entre les secours s’il s’agit d’incendie ou d’un attentat. En cas d’action violente, la première équipe de police sur place ne s’occupera pas des blessés, la priorité est de “fixer” la menace. Ils doivent en avoir conscience. On fait aussi savoir que l’alarme incendie peut être déclenchée de façon malveillante… »

Le but de cette sensibilisation est de toujours avoir un plan en tête. De savoir par où sortir si j’entends des coups de feu de mon bureau ou dans le hall d’accueil. De savoir où je peux me cacher, ce que je peux utiliser pour coincer la porte ou me défendre. Le principe est simple : se préparer pour pouvoir agir au mieux et plus vite.


Article extrait du n° 567 de Face au Risque : « Menaces et mise en sécurité des personnes » (novembre 2020).

Gaëlle Carcaly
Journaliste

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