La révolution technologique des Dati déjà à portée de main

21 février 202012 min

Cela fait plus de trois décennies que l’obligation générale de sécurité existe (loi n° 91-1414 du 30 décembre 1991 entrée en vigueur le 31 décembre 1992).
Cette obligation générale de sécurité ainsi que les obligations d’évaluation des risques et d’organisation des secours conduisent l’employeur à mettre en place une protection des travailleurs isolés (PTI), le cas échéant.

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Article extrait du n°559 de Face au Risque (publié en février 2020).


PTI, un cadre défini

Le cadre de la protection du travailleur isolé est clairement défini par la recommandation 416 de la CNAMTS (R416), adoptée le 29 novembre 2004, s’appuyant elle-même sur la recommandation 252 (R252), qui remonte pour sa part au 13 juin 1984.

Sont ainsi présentés comme cas de travail isolé toutes les situations dans lesquelles « le travailleur est hors de vue ou de portée de voix d’autres personnes et sans possibilité de recours extérieur et que le travail présente un caractère dangereux ».

Ce n’est cependant pas forcément l’activité en elle-même qui peut être considérée comme un risque, mais l’isolement du travailleur.

Un élément que prend en compte l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité) dans sa définition et pour qui « travailler de manière isolée, c’est réaliser une tâche dans un environnement de travail où l’on ne peut être vu ou entendu directement par d’autres personnes et où la probabilité de visite est faible ». Cela qu’importe la dangerosité de la tâche.

Du fait de cet isolement, la gravité d’un événement malheureux – même un simple malaise par exemple – pourrait prendre des proportions qui n’auraient pas été telles avec l’intervention rapide d’un collègue. Les probabilités même qu’un accident se produise peuvent ainsi être plus grandes. Qui dit isolement – physique et/ou psychique – dit en effet risque plus important de réactions inadaptées : par manque de lucidité, de concentration ou absence de concertation… Ce qui offre de fait un contexte plus propice à déboucher sur un potentiel accident.

De l’industrie au tertiaire

Force est de constater que les contextes de travail isolé sont plus nombreux qu’on ne pourrait le penser, comme nous l’explique Lionel Brunnengreber, président fondateur de My Angel, société française qui offre des solutions en matière de PTI. « Historiquement, la protection du travailleur isolé était surtout prise en compte par l’industrie lourde, le secteur secondaire ou la pétrochimie. Elle est en réalité universelle. »

Aujourd’hui, cette spécificité est effectivement bien plus élargie. Avec le développement toujours plus important du secteur tertiaire, la question liée aux travailleurs isolés est désormais ancrée au sein de nombreuses entreprises ou organismes disposant d’une activité de service.


« Le Dati n’est qu’un maillon de la chaîne,
même si c’est la partie émergée de l’iceberg »


Cela aussi bien dans le privé que le public. Agents d’entretien, agents sociaux, agents de sûreté, personnel médical ou secteur logistique, la liste des professions potentiellement appelées à disposer de la mise en place d’un processus de protection pour travailleur isolé ne cesse de croître.

Les causes de cette nécessité de protection sont toutefois diverses. Cela peut ainsi être en raison « d’horaires décalés dans le cas d’un agent d’entretien ou pour anticiper un risque d’agression », ajoute notre interlocuteur. Le deuxième cas de figure est parlant pour les transporteurs ou les chauffeurs de bus, dont les cas d’agressions font de plus en plus souvent les gros titres des rubriques « Faits divers ».

Comment protéger le travailleur isolé ?

La protection des travailleurs isolés, au même titre que la protection de l’ensemble des salariés, incombe juridiquement à l’entreprise.

L’employeur « se doit d’apprécier les situations de travail isolé et leurs conséquences éventuelles dans le cadre de son évaluation des risques » (INRS). La mise en place de mesures de prévention et d’organisation des secours spécifiques au travail isolé dépend ainsi logiquement de l’employeur.

Le processus de protection du travailleur isolé se décompose pour sa part en plusieurs étapes. Entre l’analyse des risques liés à un poste de travail (type de tâches, durée des missions, fréquence de ces missions), l’ajout du facteur « isolement » à ces risques (environnement de travail, organisation des missions ou horaires), la formation de la personne amenée à effectuer ces missions de manière isolée… de multiples paramètres sont pris en compte en amont afin d’assurer cette protection.

À ceux-là s’ajoute la chaîne de traitement de la protection du travailleur isolé – qui s’étend du déclenchement du Dati (dispositif d’alarme pour travailleur isolé) à la procédure d’envoi des secours. Elle est le moyen pour l’employeur de traiter efficacement les urgences potentielles de son salarié isolé en cas d’alerte.

Les Dati, la face visible de la protection

L’INRS l’a clairement indiqué dans ses documents sur le travail isolé : « Les mesures de prévention mises en place par l’employeur ne doivent en aucune manière se limiter à l’amélioration des capacités d’alarme comme la mise en oeuvre de Dati ».

En dépit de cela, les Dati restent la face la plus visible de cette chaîne de traitement, comme nous le confirme Lionel Brunnengreber.

« De l’alerte déclenchée par le Dati jusqu’à l’arrivée des secours, avec la surveillance 24 heures sur 24, c’est cela qu’on appelle la protection des travailleurs isolés : le traitement dans sa globalité. Le Dati n’étant finalement qu’un maillon de la chaîne, même si c’est la partie émergée de l’iceberg. Cette alerte ne sert à rien si on ne gère pas immédiatement l’ensemble de la procédure de secours prévue », assène-t-il.

S’il ne suffit pas à assurer la chaîne de traitement à lui seul, le dispositif d’alarme a malgré tout un rôle essentiel. Il est en effet l’élément déclencheur dans ces situations d’alerte.

« Le Dati, c’est le dispositif d’alerte. C’est ce qui permet de déclencher une alerte automatiquement (en cas de perte de verticalité, d’absence de mouvement, d’arrachage…) ou de manière volontaire. Le Dati permet de capter l’alerte et de la transmettre vers une chaîne de traitement, qui peut être gérée soit par un collègue [NDLR : si l’entreprise dispose de l’effectif nécessaire], soit par un centre d’appel, qui va avoir pour rôle de faire une levée de doute puis d’appeler les secours si le doute est confirmé », ajoute notre interlocuteur.

C’est ainsi que Lionel Brunnengreber nous explique l’utilité d’un service intégral.

« Il y a très peu d’entreprises qui sont capables de gérer les alertes elles-mêmes. Quand elles le font, elles le font très bien. Mais la plupart des entreprises ne sont pas raccordées sur les pompiers, n’ont pas d’opérabilité 24 h/24 garantissant le traitement, n’ont pas la capacité technique de gérer efficacement… ou n’ont tout simplement pas de personnel dédié pour cela. Ce qu’une société dédiée peut proposer clé en main si nécessaire et en assumer la responsabilité ».

Les Dati déjà tournés vers l’avenir

Élément essentiel de la chaîne d’alerte, les dispositifs d’alerte pour travailleur isolé bénéficient des dernières avancées technologiques. Car les moyens d’émettre un simple signal suivent inéluctablement les techniques de télécommunication. Et il est évident qu’il n’a jamais existé autant de moyens de télécommunication que depuis le début du XXIe siècle… plus particulièrement depuis l’avènement de l’ère numérique.

De fait, les Dati se sont eux aussi diversifiés dans leur format. Il n’est désormais plus rare de trouver ces dispositifs d’alarme sous la forme d’une sobre application. « Beaucoup d’entreprises se sont lancées dans la commercialisation de dispositif seul, qui peuvent être des outils connectés, des applications ou classiquement des émetteurs radios », confie le président de My Angel.

Encore faut-il pouvoir trouver celui qui convient le mieux pour ses équipes, mais également pour accompagner la chaîne de traitement dans son ensemble…

« Depuis le début, nous sommes uniquement focalisés sur cela. Nous cherchons la bonne solution de protection pour chaque client, puis nous adaptons le Dati : Quel type de matériel ? Comment le paramétrer pour un confort optimal ? Comment bien détecter les situations qu’il faut détecter ? Ou comment être sûr que cela va bien fonctionner dans les endroits ciblés ?
Le choix du Dati peut dépendre de plusieurs paramètres : ergonomie, capacités d’émission GSM, de localisation, zone d’utilisation (choix du matériel compatible avec une zone Atex par exemple)… En fonction de toutes ces contraintes, il y a des Dati qui peuvent être adaptés à certaines situations et pas à d’autres. »

My Angel a par exemple diversifié ses offres en présentant ses produits à la fois sous la forme de boîtiers, utilisables en mains libres et capables d’émettre un signal dans des zones blanches GSM « que ce soit en zone rurale ou même en zone urbaine non couverte (parkings, certains immeubles très bien isolés, locaux d’archives…) », mais également sous le format d’application sur smartphone, avec comme mot d’ordre la facilité d’utilisation.

« L’application doit être facile et pratique à utiliser. Elle ne doit pas gêner l’usage du smartphone, qui doit continuer d’être utilisé pour son usage principal. Le Dati, ce n’est pas l’usage principal d’un smartphone. Nous faisons très attention à cela », explique-t-il.


Dati application. (Image d'illustration My Angel).
Les Dati peuvent se présenter sous la forme de boîtiers mais aussi sous la forme d’application sur smartphone.

Car le risque avec un outil capable de se déclencher automatiquement, c’est aussi de voir de fausses alertes intempestives (en posant par exemple son portable à plat sur une table)… et de fait, pour l’utilisateur, le risque de vouloir placer l’appareil hors-tension pour éviter ce genre de situation.

Pour son application, My Angel a choisi de « mettre en place des ergonomies qui permettent de désactiver très temporairement les détections en temps voulu. Cela évite de déranger constamment l’utilisateur, lorsqu’il est en réunion par exemple, et favorise donc l’adoption des solutions ».

La montre connectée déjà validée

Souhaitant avoir un coup d’avance dans le domaine des Dati, la firme française envisage de développer cette technologie sur une montre connectée. Le président du groupe donne d’ailleurs les arguments ayant poussé à voir l’avenir sur le poignet.

« Les applications sur les montres connectées sont l’avenir du Dati. Cela a énormément d’avantages. C’est le meilleur endroit pour détecter les mouvements des membres supérieurs si quelqu’un est actif. On bénéficie aussi de nouvelles technologies depuis la fin de l’année dernière grâce aux eSIM. Ce sont des composants électroniques inclus dans la montre qui permettent à l’objet de capter n’importe quel réseau 4G ou GSM, et de fonctionner sans téléphone appairé. Nous sommes les seuls pour l’instant à les développer. »

Quant au fait de savoir si une alerte sur montre connectée pourra être lancée grâce au pouls de son utilisateur dans un futur proche, aucune porte n’est fermée aux yeux de notre interlocuteur.

« C’est l’avenir… de l’avenir. Les montres de ce type embarquent des capteurs de température et de rythme cardiaque. Apple en a fait la promotion et a beaucoup communiqué là-dessus, mais en réalité cela ne fonctionne pas encore vraiment car il y a beaucoup de fausses détections. Nous privilégions pour le moment les capteurs de mouvement, particulièrement fiables et maîtrisés », conclut-il.

Le pouls en phase de test

Il y a un peu plus d’un an (en janvier 2019), lors de la présentation de l’Apple Watch Series 4, Tim Cook assurait en effet auprès de la chaîne américaine CNBC que la prochaine grande contribution d’Apple porterait sur la santé.

Dans le courant de de l’année 2019, un premier bilan était réalisé à propos des innovations intégrées dans la montre permettant la détection de chute et de respiration anormale (via son application ECG).

Pour la première fonction, certains utilisateurs de la marque à la pomme se plaignaient que leur montre ne détectait pas les mouvements de chute… Quand d’autres, au contraire, pestaient car le signal se déclenchait pour un simple mouvement de poignet, comme le rapporte Watch Generation sur son site dans l’article « Apple Watch : quand la fonction de détection des chutes fait du zèle »

Une conclusion similaire en vidéo (voir ci-dessous) a par ailleurs été constatée lors des tests de chute réalisés par l’influenceur Mac4Ever.

Pour ce qui est de l’électrocardiogramme, Sciences et Avenir rappelait dans un article en ligne que « cette application affiche le rythme cardiaque, l’analyse pour détecter une éventuelle fibrillation auriculaire, mais ne donne en aucun cas un diagnostic ».

Dès l’ouverture de l’application, Apple transmet d’ailleurs un signal sans la moindre ambiguïté : « Gardez les points suivants à l’esprit : elle ne peut pas détecter une crise cardiaque, ni des caillots ou un AVC, ni d’autres pathologies cardiovasculaires ». De quoi confirmer le fait que les capteurs de rythme cardiaque et de température sont encore perfectibles.

Néanmoins, à défaut d’être optimales en ce mois de février 2020, ces montres avec capteurs ouvrent en tout cas la voie à ce qui pourrait être, dans les années à venir, le prochain axe de développement des Dati.

Eitel Mabouong, journaliste à FAR

Eitel Mabouong
Journaliste

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