La mutation stratégique du marché de la sécurité privée

16 juillet 20194 min

À quoi ressemblera le marché français de la sécurité privée dans un futur proche ? C’est à cette question qu’a tenté de répondre Xerfi-Precepta à travers une étude récemment publiée. Visiblement, au niveau international, le secteur semble promis à une mutation stratégique majeure… De laquelle ressortiront inéluctablement de grands gagnants… et les traditionnels grands perdants.

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3,2 %… Tel est le taux de croissance annuel enregistré en moyenne par le secteur de la sécurité privée en France entre 2010 et 2017. C’est en effet ce chiffre qui est avancé dans l’étude Xerfi-Precepta intitulée : « Le marché de la sécurité à l’horizon 2022 – Intensification de la concurrence et pressions sur les marges : quels leviers de croissance et perspectives pour les sociétés de sécurité privée ? ».

Si l’on se fit à cette étude, ce cercle vertueux devrait se poursuivre à moyen terme. « À l’horizon 2022, la croissance du marché restera sur un rythme de 3 % par an en moyenne pour un chiffre d’affaires proche de 8,3 milliards d’euros. La demande des entreprises et surtout des collectivités restera soutenue », annonce Nicolas Le Corre, l’auteur de cette étude.

Sécurité privée, un marché porteur mais ultra-concurrentiel

Cette croissance constante ne semble cependant pas bénéficier à l’ensemble du secteur de la sécurité privée. En France, on ne comptabiliserait pas moins de 11 000 entreprises dans ce seul secteur d’après l’enquête de Nicolas Le Corre. Ainsi, malgré une croissance de 3,2 % annuelle de moyenne, la prolifération excessive de nouvelles sociétés dans ce secteur fait que les marges restent faibles… Et seules une partie de ces entreprises tirent leur épingle du jeu. Quant aux autres, elles sont contraintes de terminer leur exercice comptable dans le rouge.

« Près d’un quart des sociétés de sécurité privée ne parviennent pas à l’équilibre », est-il ainsi précisé dans ce rapport. Celui-ci rend compte par la suite que « le taux de défaillance reste particulièrement élevé à l’échelle du secteur (entre 8 % et 12 % lors de la dernière décennie) ». Au total, ce sont de fait entre 35 % et 40 % des entreprises de la sécurité privée qui ne tirent pas profit de ce marché, pourtant porteur de croissance.

La mutation des modèles déjà enclenchée

Il n’y a cependant pas que des victimes dans le secteur de la sécurité privée. Nicolas Le Corre parle d’ailleurs d’un « marché fragmenté ». Des fragments qui profitent notamment à quelques mastodontes du secteur. Un oligopole qui, afin de poursuivre sa mainmise sur le marché, est d’ores et déjà dans la sécurité privée de demain.

« Une phase de consolidation s’est amorcée en 2018 » note l’auteur de l’étude. Force est de constater que les moyens ne manquent pas parmi les grands pontes du marché. Pour certaines de ces entreprises majeures, cela passe par le rachat de concurrents. Exemple au niveau international avec Allied Universal, qui a racheté  un de ses concurrents – U.S. Security Associates – pour environ 1 milliard de dollars en octobre 2018… Et dont le nouveau groupe est détenu à 35,5% par Wendel… une société d’investissement française. Pour d’autres, cela passe par la diversification des activités.

« Ces opérations s’inscrivent dans un contexte de mutation du secteur marquée par une logique de continuité entre la surveillance humaine et le conseil en sûreté et une convergence entre sécurité physique et cybersécurité », confie l’interlocuteur.

« Les activités de nombreux acteurs s’étendent et se recoupent : surveillance humaine, sécurité des voyageurs, conseil en sûreté, intelligence économique et stratégique, gestion de crises, lutte anti-fraude et compliance, cybersécurité », précise l’étude. « Des opportunités s’ouvrent donc et laissent augurer des rapprochements ces prochaines années », ajoute en outre Nicolas Le Corre.

Des disparités plus importantes inéluctables à l’avenir…

Si ces diversifications d’activités devraient s’avérer bénéfiques à l’ensemble du marché à long terme, une fois encore, celles-ci seront en premier lieu profitables à cette oligarchie bien établie. Tandis que ces grands groupes déjà établis disposeraient de nouvelles ressources financières pour « investir, former leurs salariés voire même effectuer des acquisitions pour se doter de nouvelles compétences », les entreprises plus modestes seraient quant à elles cantonnées au « gardiennage humain ». C’est en tout cas la vision mise en avant par cette enquête.

De quoi amplifier la sensation de fragmentation sur le marché de la sécurité privée… En France, comme à l’international.

Eitel Mabouong – Journaliste

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