Explosions chez Arkema à Jarrie en 2022 : le rapport du BEA-RI est publié

15 janvier 20245 min

Le 10 novembre 2022, une série d’explosions se produit au sein de l’atelier de chlorate de sodium de l’usine Arkema située à Jarrie (38), site classé Seveso seuil haut. L’évènement n’a pas fait de victimes et n’a pas entraîné d’atteinte à l’environnement significative. Cependant, le caractère exceptionnel de l’accident et le montant des dégâts occasionnés ont conduit le BEA-RI à déclencher une enquête.

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Située à une quinzaine de kilomètres au sud de Grenoble, le site d’Arkema de Jarrie emploie près de 340 personnes peut-on lire sur le site internet de la société. L’usine utilise et fabrique divers produits chimiques à base de chlore. L’accident s’est produit le 10 novembre 2022 dans l’atelier de conditionnement du chlorate de sodium, utilisé pour le blanchiment de la pâte à papier.

Classé Seveso seuil haut, le site d’Arkema à Jarrie fait partie d’une plateforme chimique où exercent plusieurs autres sociétés, dont l’entreprise Framatome. Un plan de prévention des risques technologiques (PPRT) existe pour les établissements Arkema et Areva-Cezus (arrêté révisé en 2015). Des habitations et une école maternelle de la commune voisine de Champ-sur-Drac sont situées dans un périmètre inférieur à 1 kilomètre du site.

Le site d'Arkema de Jarrie fait partie d'une plateforme chimique comportant d'autres usines à proximité, ainsi que des ERP et des habitations. Crédit : Google maps

Le site Arkema de Jarrie fait partie d’une plateforme chimique comportant d’autres usines à proximité, ainsi que des ERP et des habitations.

Les faits : un départ d’incendie et six explosions

Le jeudi 10 novembre 2022 à 8h32 un incendie, probablement d’origine électrique, prend naissance dans le bâtiment de conditionnement du chlorate de sodium, au nord du site.

L’incendie sera rapidement suivi de 6 explosions (décompte effectué après visionnage des images de la vidéosurveillance), qui détruisent l’intérieur du bâtiment et sa toiture constituée d’amiante. Une épaisse colonne de fumée est visible à plusieurs kilomètres à la ronde.

Un opérateur a tenté sans succès de juguler le départ de feu au moyen d’un extincteur, puis l’installation d’extinction automatique de type déluge s’est mise en action. L’exploitant a déclenché son POI à 8h42, ouvrant une cellule de crise. Le feu est maîtrisé peu après 9h10, juste après l’arrivée du Sdis 38 et des pompiers de la plateforme chimique voisine de Pont-de-Claix.

Par mesure de précaution, le préfet de l’Isère fait résonner les sirènes du Plan particulier d’intervention (PPI) à 9h19, pour alerter la population et lui demander de se confiner dans un périmètre de 1100 mètres (zonage PPI). L’alerte est levée à 10h20.

Aucune personne n’a été blessée et les impacts environnementaux sont jugés non significatifs, après mesures de toxicité des rejets.

Plusieurs enquêtes engagées

L’importance de l’événement du 10 novembre 2022 peut s’apprécier au travers de divers éléments :

  • selon un rex de l’IRMa à propos de l’alerte donnée à la population, cet accident a été « le plus impactant des 30 dernières années pour l’agglomération grenobloise et le seul événement qui a conduit, au cours de cette période, au déclenchement des sirènes PPI (Plan particulier d’intervention) ». Le rapport se penche sur les modalités du déclenchement de l’alerte et les réactions des riverains ;
  • d’autre part, les dommages entraînés par l’accident pour l’exploitant ont conduit à la perte de 3,9 tonnes de chlorate avec un montant estimatif de dommages matériels estimés entre 3 et 5 millions d’euros (source : rapport de l’Inspection des installations classées, visite d’inspection du 18/11/2022, site Géorisques) ;
  • le caractère exceptionnel et le phénomène inconnu (explosion du chlorate) pour l’exploitant ont conduit Arkema à mener des investigations en interne, tandis que le contexte et les circonstances de l’accident ont décidé le BEA-RI à ouvrir une enquête (le jour de l’accident, des inspecteurs de la Dreal étaient présents sur le site dans le cadre d’un exercice mené sur un autre atelier).

Les enseignements de sécurité de l’enquête du BEA-RI

L’enquête du BEA-RI, qui s’appuie sur les investigations menées en interne par Arkema, a permis d’attribuer cette explosion à un mélange de plastique et de chlorate de sodium fondus. Le rapport détaille les circonstances de l’accident et propose quatre enseignements de sécurité ayant trait :

  • au comportement du chlorate de sodium pris dans un incendie ;
  • à l’utilisation des palettes plastiques ;
  • à l’utilisation des big-bags ;
  • à la vérification de l’adéquation du système d’extinction automatique à eau.

Les recommandations du BEA-RI

Elles concernent :

  • la limitation de la présence de matières combustibles et de poussières de chlorate de sodium dans les ateliers ;
  • l’interdiction de l’utilisation de palettes plastiques dans les ateliers de fabrication et de conditionnement de chlorate de sodium ;
  • la mise à jour des documents de prévention des risques suite à cet accident, la réactivité du système d’extinction de l’atelier face à un incendie ;
  • la sensibilisation des opérateurs et des services de secours au risque d’explosion présenté par le chlorate de sodium et enfin à la conception de l’installation électrique.
Bernard Jaguenaud, rédacteur en chef

Bernard Jaguenaud – Rédacteur en chef

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