Une arnaque au président fait perdre 38 millions d’euros à une entreprise

21 mars 20234 min
Une entreprise française victime d'une arnaque au président perd 38 millions d'euros. (Crédit photo rawpixel.com _ PxHere CC).

Une arnaque au président fait perdre 38 millions d’euros à une entreprise

Une entreprise française a perdu 38 millions d’euros dans une arnaque au président en fin d’année 2021. Europol a procédé à plusieurs arrestations entre juin 2022 et janvier 2023 suite à une enquête internationale de plusieurs mois.

Arnaque au président : le mode opératoire

L’histoire débute en décembre 2021 en Île-de-France. Le comptable du promoteur immobilier Sefri-Cime est contacté par téléphone par un homme se disant avocat d’un grand cabinet.

Ce dernier confie alors au comptable qu’une opération confidentielle de rachat de sociétés est en cours. Il ajoute par ailleurs que le président de l’entreprise est d’ores et déjà d’accord pour cette opération.

Dans la foulée de cet appel, le comptable de Sefri-Cime reçoit un mail, sans savoir qu’il provient d’une adresse usurpant celle du président de l’entreprise.

Dans ce message, le faux dirigeant demande alors à son collaborateur d’effectuer plusieurs virements visant à finaliser ce rachat de sociétés.

Libération précise que ce sont au final plus de 40 virements qui seront effectués en quelques jours. Le tout pour un montant total de 38 millions d’euros. Soit la somme la plus importante jamais extorquée pour une entreprise en France dans une escroquerie de type arnaque au président.

Une plainte est déposée en janvier 2022 au commissariat du XIVe arrondissement de Paris.

Une affaire similaire en Haute-Marne

Dans le même laps de temps, une entreprise de métallurgie située en Haute-Marne avait également été victime d’une arnaque au président. Avec un mode opératoire similaire.

C’est cette fois-ci une somme de 300 000 euros que réclamera le dirigeant fictif au comptable de l’entreprise. Le tout à virer sur un compte hongrois.

C’est au moment où le comptable s’apprêtait à virer l’argent que la supercherie est découverte. Une plainte est déposée dans la foulée. Les enquêteurs découvriront que cet appel a été passé depuis Israël.

Une enquête internationale menée avec Europol

C’est à la suite de cette deuxième plainte, déposée à Paris en janvier 2022, qu’un lien est fait entre les deux affaires. L’escroquerie prend alors une dimension internationale, comme le confie Europol sur son site internet. Plusieurs pays européens sont mis à contribution, dont Israël d’où le premier coup de fil avait été passé.

En Croatie, l’enquête permet de découvrir l’identité des mules financières. Autrement dit, les personnes chargées de transférer l’argent entre les comptes dans divers pays. La reconnaissance faciale aura notamment joué un rôle prépondérant.

“Les enquêteurs ont eu recours à un logiciel de reconnaissance faciale pour les identifier dans un fichier de police – le TAJ, traitement d’antécédents judiciaires –, les escrocs ayant souvent laissé leurs vraies photos sur les faux papiers” souligne Libération. L’enquête croate débouche également sur le gel d’une somme de 600 000 euros sur plusieurs comptes bancaires.

Au Portugal, les autorités parviennent à saisir une somme de 3 millions d’euros sur différents comptes. En Hongrie, les enquêteurs découvrent que plus de 7 millions d’euros ont été reçus sur des comptes bancaires hongrois “avant d’être retirés en espèces ou transférés sur des comptes dans d’autres pays”. 1,1 million d’euros sont par ailleurs saisis.

400 000 euros sont également saisis sur des comptes espagnols. Enfin 350 000 euros en cryptomonnaies sont par ailleurs récupérés par les enquêteurs.

Au total, ce sont ainsi près de 5,5 millions d’euros – sur les 38 millions d’euros de base – qui ont été retrouvés.

Des arrestations en France et en Israël

Entre juin 2022 et janvier 2023, 8 personnes sont arrêtées dans cette affaire d’arnaque au président.

Six l’ont été en France (en région parisienne) pour des soupçons de participation au blanchiment de l’escroquerie. Les Echos précise qu’ils ont toutefois été “laissés libres et sans poursuites” pour le moment.

Deux autres personnes ont été arrêtées en Israël en juillet 2022, dont la tête pensante du réseau.

Un cas précédent avec le “faux Le Drian”

À noter que sur cette affaire, le procédé se veut plus poussé qu’à l’accoutumée. Dans la plupart des arnaques au président, seul un e-mail est envoyé. Les appels téléphoniques, en plus des traditionnels e-mails, permettent de renforcer la crédibilité de la démarche auprès de la cible finale. Des cas tout aussi poussés existent en France.

Preuve en est avec “le gang du faux Le Drian”. Entre l’été 2015 et la fin d’année 2016, des escrocs ont dérobé 55 millions d’euros (dont une quarantaine de millions d’euros à l’international) en se faisant passer pour Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense.

En plus des mails, des appels téléphoniques et des visioconférences via Skype servaient à crédibiliser leur action. L’argument mis en avant était un besoin de fonds pour le paiement de rançons d’otages français en Syrie.

Deux des auteurs de cette arnaque au président ont écopé de 7 ans et 10 ans de prison en septembre 2020.

Eitel Mabouong, journaliste à FAR

Eitel Mabouong
Journaliste

---

Les plus lus…

Inscrivez-vous
à notre
newsletter

Recevez toutes les actualités et informations sûreté, incendie et sécurité toutes les semaines.