Clauses du contrat de maintenance : les points de vigilance

14 octobre 202110 min

Le contrat de maintenance est un acte juridique qui devient une pièce essentielle en cas de sinistre ou de litige. Les clauses doivent donc être rédigées et relues attentivement pour éviter les mauvaises surprises. Si tout est important dans un contrat, certains points méritent une attention particulière.

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Il n’y a pas de cadre spécifique pour définir les clauses d’un contrat de maintenance ou leur ordre. Chaque entreprise peut les rédiger en fonction de son service juridique, de ses habitudes, des relations entre clients et fournisseurs.

« On retrouve dans un contrat des clauses administratives et des clauses techniques, explique Yves Goacolou, consultant expert à CNPP. Il existe des guides disponibles pour établir les choses. Pour la partie administrative, il s’agit du cahier des clauses administratives générales (CCAG) pour les fournitures courantes et services, qu’on trouve sur Légifrance. Il va permettre de dérouler tous les événements que l’on peut rencontrer au cours d’un contrat pour les prévoir. Pour la partie technique, c’est la brochure 5659 du JO qui nous intéresse. Deux outils viennent préciser ces éléments : la norme européenne NF EN 13306 relative à la maintenance qui définit les différentes formes de maintenance et la terminologie à employer (tous types de maintenance), et la NF S 61-933 qui est destinée à la maintenance du système de sécurité incendie (SSI). »

S’il existe entre les contrats de grosses variations car peu de personnes connaissent les règles générales, il y a cependant des clauses indispensables et des points de vigilance que le mainteneur et le propriétaire du bien doivent garder en tête.

Les clauses qu’il faut trouver dans un contrat de maintenance

  • Les parties en présence : désignation sociale, type de société et capital, adresse du siège social, interlocuteurs pour chaque entreprise.
  • L’objet du contrat et les définitions : types de prestations convenues, définitions, description du parc, de l’installation, lieu(x) de réalisation des prestations
  • La facturation : adresse, modalités, délais de paiement…
  • La nature et l’étendue de la prestation :
    • vérifications périodiques des installations (nature de la prestation, fréquence de réalisation, nombre de visites). Maintenance préventive (nombre de visites, modalités de prise de rendez-vous, contenu des visites). Maintenance corrective (modalités d’appel, délais d’intervention et délai d’indisponibilité, période ouvrée et non ouvrée…) ;
    • étendue des prestations (descriptif des prestations et installations, limites de prestations, exclusions) ;
    • fourniture d’équipements neufs ;
    • réforme et mise au rebut d’équipement ;
    • mesures compensatoires : les incidences de maintenance ou de pannes doivent être prévues dès la phase commerciale.

Prenons l’exemple d’un SSI de catégorie A, des détecteurs jusqu’au DAS. « Attention aux ambiguïtés de compréhension entre le mainteneur et le client sur l’étendue de la prestation. Par exemple, le client peut comprendre que le mainteneur s’occupe de tout le SSI alors que le contrat s’arrête à la commande des DAS, explique Arnaud Pian, chef de service Technologies d’extinction du département Formation de CNPP. Le mainteneur va alors maintenir ce qui commande les portes mais pas les portes elles-mêmes. Il ne va pas forcément vérifier qu’elles sont conformes à ce qui était demandé à l’origine. »

Idem avec les RIA. Les mainteneurs s’occupent des postes de RIA mais pas forcément de toute l’installation. « Si le contrat stipule que le mainteneur ne maintient que les postes de RIA, le client doit être bien conscient qu’il devra réaliser un autre contrat pour le maintien des sources d’eau, ajoute Arnaud Pian. Il y a un gros travail de sensibilisation à faire auprès des exploitants sur l’importance du contrat et la nécessité de définir le niveau de prestation attendu et les limites du contrat. »

En cas de panne ou de défaillance du prestataire, l’exploitant reste responsable de son site (obligation de sécurité de résultat). Il faut déterminer dans le contrat qui paie les mesures à mettre en place (en accord avec l’assureur et les services de secours) : rondes spécifiques, recours au Sdis, compartimentage forcé, formation spécifique, évacuation totale ou partielle…

Le prestataire n’est tenu que par son contrat (délai d’intervention, d’indisponibilité à déterminer). Il peut par exemple être écrit dans le contrat que l’exploitant autorise une indisponibilité de 5 heures du SSI. Au-delà, les mesures compensatoires ne sont plus à ses frais mais à ceux du mainteneur.

  • Les modalités d’exécution :
    • mise en œuvre des prestations (moyens à prévoir, moyens mis à disposition) ;
    • sous-traitance. Ces informations doivent être portées à la connaissance du client, notamment afin de prévoir s’il y a besoin de conditions particulières dans le contrat (limitation à un pourcentage de la prestation), d’agréer les sous-traitants et co-traitants et les intégrer dans le plan de prévention. Attention à la sous-traitance en cascade : bien en définir les modalités dans la phase commerciale du contrat de maintenance ;
    • état des lieux et inventaire par équipement ;
    • jours, horaires d’intervention (par exemple date et heure fixées avec un préavis d’environ 8 jours, si changement, prévenir 48 heures avant) et accès par équipement ;
    • délais d’intervention. « Quand je prépare un contrat, j’identifie trois types de délais : le délai d’intervention, qui court entre le moment où on demande l’intervention du mainteneur et celui où un technicien compétent arrive sur site, le délai de dépannage, entre le point zéro et le moment où le matériel retrouve ses fonctions essentielles, et enfin le délai de réparation, quand le matériel retrouve ses caractéristiques initiales », souligne Yves Goacolou ;
    • accès et consignes (procédure d’autorisation particulière le cas échéant, procédures d’hygiène et de sécurité, élaboration du plan de prévention par le donneur d’ordres) ;
    • signalisation des chantiers ;
    • dépannages.
  • Les pénalités en cas de non-respect des délais/ primes.
  • Les référentiels à prendre en compte. Agrément, certifications et habilitations requis.

Il est souvent facile de reporter la faute sur le mainteneur ; l’exploitant ne doit pas oublier ses responsabilités. Il doit veiller à la formation de son personnel et aussi à informer le mainteneur des changements sur l’installation.

« Si on prend l’exemple de l’extinction automatique à gaz, souvent utilisée dans des locaux informatiques, les locaux doivent être étanches. L’informatique change en permanence, on repasse des câbles, on refait des trous dans les murs… Le système a été prévu avec un taux de fuites pris en compte lors de l’installation. Si les trous ne sont pas rebouchés, ce n’est plus conforme à ce qui avait été testé à l’origine, illustre Arnaud Pian. Certes le mainteneur devrait le voir, mais il intervient deux fois par an. Il faut une réelle communication entre l’exploitant et le mainteneur. »

Au mainteneur aussi de prévenir quand il arrive et de s’informer d’éventuelles modifications.

  • La traçabilité des opérations de maintenance : rapport d’intervention, carnet d’exploitation, émargement du registre de sécurité, rapport technique et financier, extranet du prestataire.
  • Les documents à transmettre : par le donneur d’ordres (DOE, DUIO, plan de prévention, dossier d’identité…) et par le prestataire (attestation d’assurance, habilitations, attestations de formation…).

« Un point très important et lourd à mettre en place par l’exploitant, quand il veut réaliser un bon contrat de maintenance, c’est de mettre le mainteneur en état de connaître parfaitement le produit qu’il aura à maintenir, prévient Yves Goacolou. L’exploitant devrait avoir un dossier de l’installation le plus complet possible pour que le mainteneur sache à quoi il s’engage en termes de moyens et de temps. »

  • Les responsabilités, assurances, garanties. L’assurance du prestataire doit couvrir l’activité et correspondre à l’année. Toujours demander l’attestation. Attention aux exclusions et aux plafonds de garantie. Cas de force majeure.
  • La réglementation en matière de droit du travail : travail dissimulé et marchandage, transmission tous les 6 mois du justificatif d’immatriculation, attestation Urssaf et attestation sur la régularité de l’embauche et le respect du code du travail.
  • La confidentialité (engagements). « Dans le cas des activités sensibles, il peut y avoir transmission d’informations sensibles au mainteneur. Ce dernier se doit bien sûr de respecter la confidentialité de ce qui va être fourni. Un point important est la restitution en fin de contrat des documents qui ont été mis à disposition du mainteneur », détaille Yves Goacolou.
  • La durée du contrat et les modalités de résiliation et cession du contrat. Sans précision de durée, le contrat peut être rompu sans préavis par l’une ou l’autre des parties.
  • Le prix des prestations : établissement du prix, révision des prix, modalités de paiement, ce qui n’est pas inclus, primes et pénalités.

Il doit y avoir une vraie discussion entre le mainteneur et l’exploitant. « Le gros défaut se retrouve souvent dans les appels d’offres qui veulent un coût de maintenance à l’extincteur. Mais tous les contrats ne se valent pas : est-ce que les pièces détachées sont comprises dans le prix ? Si oui, lesquelles ? Est-ce que la maintenance de ces pièces est comprise dans le contrat ? Tout ça doit être transparent dans le contrat. Les prix les plus bas cachent souvent des surprises », souligne Arnaud Pian.

Conseil pour les pièces de rechange et consommables : identifier les coûts unitaires de base de dépannage dans le contrat (coût horaire selon profil de l’intervenant, frais forfaitaire de vacation, coûts de déplacement). Inclure dans le prix de vérification les consommables qui sont systématiquement remplacés à chaque visite (par exemple les plombs et joints des extincteurs). Pour le reste, l’idéal est que le mainteneur fournisse un bordereau de prix unitaire des pièces de rechange.

« On peut exiger que le mainteneur ait un minimum de stock des pièces de rechange des matériels à maintenir, mais le client peut aussi disposer d’un stock de pièces de rechange, ajoute Yves Goacolou. Si ce sont des installations standards, il est raisonnable de tout confier au mainteneur. Quand les matériels sont spécifiques, il est préférable que l’exploitant dispose lui aussi d’un stock tampon. »

  • Le suivi des prestations : par qui ? Comment ? « Il ne s’agit pas de savoir faire ce que le mainteneur doit faire, mais de savoir ce qu’il doit réaliser en conformité avec le contrat passé, indique Arnaud Pian. Faire un suivi et vérifier que le mainteneur réalise la prestation prévue. »
  • Le règlement des litiges : les compétences en cas de litige.

Voici une liste d’exemples non exhaustive :

  • modalités de vérification par nature des équipements ;
  • liste des sites concernés ;
  • inventaire des matériels à maintenir (il doit être détaillé et exhaustif. Il est préférable de le mettre en annexe pour ne remplacer que cette annexe dans un avenant en cas d’évolution) ;
  • tableau de prix des prestations et équipements ;
  • bordereau de prix unitaire des pièces détachées ;
  • les conditions générales de vente (CGV) du prestataire ;
  • attestation d’assurance en responsabilité civile ;
  • attestation sur le travail dissimulé ;
  • plan de prévention ;
  • règlement intérieur de l’entreprise d’accueil…

Les avenants

À chaque changement de la configuration de l’installation ou de matériel ou des conditions initiales, il est nécessaire de réaliser un avenant au contrat. Celui-ci explicite les points modifiés (prix, durée, définition des prestations, périmètre d’intervention…). Après sa signature, il fait partie intégrante du contrat.


Article extrait du n° 575 de Face au Risque : « Incendie : le contrat de maintenance » (septembre 2021).

Gaëlle Carcaly – Journaliste

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