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Il y a 30 ans, incendie aux thermes de Barbotan
Article extrait du n° 573 de Face au Risque : « ERP et Covid-19, l’impact sur la sécurité – sûreté » (juin 2021).
Deux artisans refont l’étanchéité de la toiture-terrasse de cette zone de l’établissement. L’un des deux renverse accidentellement un seau contenant du goudron brûlant. Le bitume en fusion s’écoule par un orifice dans la dalle, et tombe sur une cloison d’isolation thermique en polystyrène qui prend feu. Celui-ci se propage à une autre cloison et au faux plafond. Se consumant, ils dégagent gaz et fumées toxiques qui se répandent dans les locaux.
Le bilan
Un pompier en vigie surveillant la forêt aperçoit une fumée noire au-dessus de l’établissement thermal et donne l’alerte.
N’ayant pas eu le temps d’évacuer, 20 personnes meurent asphyxiées. Parmi elles, on compte 19 curistes et 1 employée.
Une 21e victime succombera plus tard de troubles neuropsychiques, conséquences du sinistre.
Une succession de violations au règlement de sécurité.
A la suite du drame, de très nombreux dysfonctionnements ont été relevés par les experts.
La direction de l’établissement, géré par la Chaîne thermale du soleil (CTS), n’a pas fermé la partie piscines pendant la durée des travaux. Ceux-ci étant dangereux, ils étaient soumis à autorisation et devaient être réalisés en dehors de toute présence du public.
L’incendie s’est développé très rapidement et a provoqué d’épaisses fumées toxiques pour plusieurs raisons. D’abord, le comportement au feu des matériaux composant le faux plafond et les cloisons ne satisfaisait pas à la réglementation. Ensuite, les locaux n’étaient pourvus ni de murs coupe-feu, ni de détection incendie, ni de système de désenfumage.
L’alerte et l’évacuation des curistes – âgés ou à mobilité réduite pour la plupart – et du personnel se sont faites dans les pires conditions puisque l’établissement ne disposait ni d’alarme, ni de signalisation d’évacuation, ni d’affichage des consignes d’incendie, ni même d’issue de secours dans cette partie du bâtiment… En outre, aucun exercice d’évacuation n’avait jamais été pratiqué.
Pas de visite de sécurité
L’expertise a révélé également que l’établissement avait effectué des travaux d’agrandissement entre 1985 et 1988 et recevait, dans l’extension où l’incendie a eu lieu, des curistes depuis septembre 1987 alors qu’aucune visite de réception de la commission de sécurité n’avait été sollicitée et qu’aucune autorisation d’ouverture au public n’avait été délivrée. Autrement dit, cette extension était illégale.
La dernière visite de la commission de sécurité datait de 1986. Or, une visite annuelle était obligatoire en raison de l’importance de la fréquentation de l’établissement rénové.
Le maire de Cazaubon en est le premier responsable. C’était à lui de provoquer la visite de sécurité. Celle-ci aurait immanquablement permis de constater les nombreux manquements à l’origine du sinistre mais l’édile n’a pris aucune disposition pour mettre fin à cette exploitation irrégulière.
Par ailleurs le préfet ne pouvait ignorer ce manquement. Il lui sera reproché, ainsi qu’à son prédécesseur, de ne pas avoir effectué de recensement annuel des établissements recevant du public de son département.
Treize prévenus au tribunal
Le 18 novembre 1996, treize personnes comparaissaient devant le tribunal correctionnel de Toulouse pour « maladresse, négligence ou manquement à l’obligation de sécurité imposée par la loi ou les règlements ».
Le préfet, son prédécesseur et le directeur régional de l’Apave, organisme de contrôle technique, ont été relaxés.
En revanche, l’architecte et le directeur de CTS qui gérait l’établissement ont été condamnés à deux ans de prison, dont huit mois fermes, et à 30 000 francs d’amende.
Les secrétaires généraux des thermes ont écopé d’un an de prison avec sursis et 30 000 francs d’amende.
Et les artisans qui travaillaient sur le toit à des peines d’un à dix mois de prison avec sursis et 10 000 francs d’amende.
Quant au maire, il a été condamné à dix mois de prison avec sursis et 20 000 francs d’amende. Selon les juges, il « n’a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient et (…) son abstention fautive a contribué à la mort des nombreuses victimes ».
Les condamnations prononcées ont été confirmées par la cour d’appel de Toulouse le 29 janvier 1998, puis par la Cour de cassation le 29 juin 1999.
Martine Porez
Journaliste
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