Vol au musée du Louvre : les critiques de la Cour des comptes sur la sécurité

13 novembre 20255 min

Le jeudi 6 novembre 2025, le Premier président de la Cour des comptes a présenté à la presse le résultat des travaux de l’institution de contrôle concernant la gestion du musée du Louvre sur la période 2018-2024. Le rapport des sages de la rue Cambon est accablant et remet en cause la stratégie adoptée par l’établissement public, l’incitant à donner la priorité au renforcement de ses dispositifs de sécurité.

Le 6 novembre 2025, Pierre Moscovici, Premier président de la Cour des comptes, a présenté le rapport sur la gestion du musée du Louvre. Crédit : Patrick Haas

Hasard du calendrier : trois semaines après le spectaculaire vol de bijoux historiques au Louvre, la Cour des comptes publie un rapport sur la gestion du musée. Ce document de 153 pages a été entièrement rédigé avant le cambriolage et aucune modification n’y a été apportée après, a tenu à préciser Pierre Moscovici, Premier président de la Cour des comptes au cours d’une conférence de presse le 6 novembre.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le constat est accablant.

Des priorités à revoir

Le musée du Louvre « a privilégié les opérations visibles et attractives, comme l’acquisition d’œuvres – pour 105 M€ sur ressources propres entre 2018 et 2024 -, au détriment de l’entretien et de la rénovation des bâtiments et installations techniques, notamment de sûreté et de sécurité », a affirmé Pierre Moscovici.

Disposant d’une santé financière « solide », le musée n’a pas besoin de financements supplémentaires de l’Etat : le problème se situe dans l’affectation des ressources, selon le rapport de la Cour des comptes. « Il faut impérativement donner la priorité à la modernisation des infrastructures techniques et au premier rang à la sécurité », a déclaré son Premier président. Il a également souligné que le ministère de la Culture n’a pas joué « tout son rôle » en ce qui concerne la gestion du musée, notamment parce qu’il a eu « peu de prises sur ses orientations stratégiques » et « n’a pas effectué de pilotage réel ».

Des insuffisances structurelles, un manque d’investissements

Entre 2018 et 2024, seulement 3 M€ ont été affectés pour la mise en œuvre du schéma directeur de sécurité sur un budget prévisionnel de 86 M€, soit 4 % du coût total. Un audit de sûreté avait pourtant été réalisé en 2017 par l’INHESJ (Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice) dont les résultats étaient « préoccupants » : inexistence d’un schéma directeur ou plan d’action sûreté, inadaptation et caractère vieillissant des dispositifs techniques de protection du site, intérieurs et extérieurs (protection mécanique, vidéosurveillance, détection électronique et contrôle d’accès), mauvaise préparation à la gestion de crise, manque de contrôles aux points d’accueil, et de contrôle et protection insuffisante des œuvres pendant les travaux. D’autres audits ont été effectués en 2021 puis en 2023.

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Sécurité incendie : du retard dans la mise en conformité

La situation est similaire pour la sécurité incendie du musée. L’élaboration d’un schéma directeur incendie s’est étalé entre 2004 et 2009, avec un coût de 52 M€ (valeur 2010). En 2024, sa mise en œuvre n’était toujours pas achevée : si les nouveaux systèmes de sécurité incendie ont été déployés dans l’ensemble du musée entre 2012 et 2020, deux opérations de mise en conformité des systèmes de désenfumage doivent être menées dans les zones Napoléon, Richelieu et Sully. Sur la période 2018-2024, le musée a consacré 4,5 M€ à la mise en œuvre de son schéma directeur incendie, soit 9 % seulement de son coût total estimé, relève le rapport.

La vidéosurveillance pas au niveau

En ce qui concerne le nombre de caméras installées, la Cour indique que les investissements se sont concentrés sur l’aile Napoléon alors que 60 % des salles de l’aile Sully et 75 % pour l’aile Richelieu ne sont pas protégées par de tels dispositifs. Entre 2019 et 2024, le nombre de caméras est passé de 294 à 432.

Le vol du 19 octobre a été « un signal d’alarme assourdissant » concernant les retards « considérables » accumulés et a démontré « l’inadaptation des dispositifs de sûreté », a estimé Pierre Moscovici en conclusion.

La réaction du musée du Louvre

Nouvel hasard du calendrier, le lendemain de la publication de ce rapport, porté à la connaissance de la direction du musée du Louvre le 31 octobre 2025, cette dernière a dévoilé plusieurs mesures d’urgence : création d’un comité de pilotage sûreté et d’un poste de coordinateur sûreté, rattaché à la présidence. Des audits de sûreté sont lancés immédiatement, de même que des rondes de surveillance plus nombreuses. Le budget formation des agents sera augmenté de 20 % mais aucun recrutement n’a été annoncé, au grand dam des organisations syndicales, très remontées sur ce sujet.

Dans les prochaines semaines, des équipements de mise à distance aux abords immédiats seront installés et des caméras supplémentaires seront implantées dans les prochains mois. Le musée a d’ailleurs précisé que durant la période 2022-2025, 134 caméras numériques ont été installées en complément ou en remplacement des caméras analogiques.

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Patrick Haas

Journaliste et directeur d’En Toute Sécurité

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