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Retour d’expérience. Un Tour de France 2020 singulier
Le Tour de France 2021 se déroulera comme prévu du 26 juin au 10 juillet. L’année dernière, à cause de la crise sanitaire, la compétition sportive, l’une des plus suivies au monde, a dû être reportée de plusieurs semaines, avec des mesures sanitaires strictes. Comment l’organisation avait-elle géré ces contraintes ? Explications de Florian Vuillaume d’ASO, l’organisateur de l’événement.
Édition 2020 reportée en septembre
« Lorsque le confinement est arrivé, nous avions déjà validé administrativement 90% du Tour de France », précise en préambule Florian Vuillaume. Il est responsable du département Organisation d’ASO (Amaury Sport Organisation), entreprise créatrice et organisatrice d’événements sportifs internationaux.
En effet, nous explique-t-il, le parcours du Tour de France est préparé environ 18 mois à l’avance. Il est ensuite validé par les autorités préfectorales des départements qu’il traverse et par les maires des villes étapes.
Pour l’édition de 2020, les validations se sont faites entre octobre 2019 et mars 2020. Mais en avril, à cause de la crise sanitaire, de nouvelles dates sont fixées : les épreuves de cette 107e édition ne se dérouleront pas en juillet comme d’habitude mais du 29 août au 20 septembre. « Quand nous avons décidé de maintenir le Tour de France, le premier objectif était donc de ne pas modifier le parcours », explique Florian Vuillaume.
Un nouveau modèle d’organisation
Afin de répondre aux nouveaux objectifs sanitaires, il a fallu revoir l’organisation. « Nous avons dès avril envisagé deux feuilles de route. Une première, la plus optimiste, avec une pandémie qui aurait largement diminué en fin d’été, et une seconde qui réduisait les effectifs de l’organisation de 40 %. »
Fin juin, ASO a décidé d’appliquer ce deuxième scenario, en concertation avec les autorités sanitaires, c’est-à-dire les ministères de la Santé, de l’Intérieur et le Centre interministériel de crise qui dépend du Premier ministre.
« Il nous fallait donc rester dans la fameuse jauge de 5000 personnes établie par les autorités sanitaires françaises », poursuit Florian Vuillaume.
C’est ainsi que le Tour de France allait passer de 5000 accrédités permanents à 3500 : moins de journalistes, des zones techniques réduites, une caravane publicitaire de 100 véhicules au lieu des 160 à 170 habituels…
Les plans de prévention révisés
« Tous les plans de prévention et les protocoles sanitaires ont été réécrits en fonction de chaque poste de travail : zones techniques, partie restauration, caravane du Tour, chauffeurs… Nous avons décliné au total une vingtaine de plans de prévention spécifiques, en adaptant les gestes barrières, les masques, les gels hydroalcooliques…, détaille le responsable Organisation d’ASO. Il a fallu également adapter les documents de travail, les règlements intérieurs en place dans les différentes zones. Tous les process de distribution de goodies de la caravane ainsi que la protection des personnes au travail ont également été révisés. »
Le protocole sanitaire de la caravane publicitaire était exigeant et des mesures restrictives étaient imposées, notamment les arrosages d’eau.
L’aide de deux préventeurs
Deux préventeurs coordinateurs ont apporté leur savoir-faire pour la rédaction des plans de prévention et protocoles sanitaires.
Début août, ces différents documents ont été communiqués aux prestataires du Tour pour qu’ils réadaptent leurs dispositifs et puissent recruter le personnel nécessaire.
Une cellule dédiée aux enjeux Covid
Par ailleurs, une cellule Covid-19 a été mise en place. Elle était composée :
- des deux préventeurs coordinateurs ;
- d’un ingénieur NRBC (risques nucléaires, radiologiques, biologiques, chimiques) ;
- du médecin référent Covid-19 ;
- d’un infectiologue;
- et d’un laboratoire mobile de tests qui allait suivre la totalité de la compétition avec des capacités de tests performants, les résultats pouvant être donnés en 1.
Le protocole sanitaire pendant le Tour
Pour faciliter la mise en place du protocole sanitaire, une segmentation des populations évoluant sur le Tour a été définie. « Nous avons créé des bulles sanitaires dans lesquelles les personnes étaient réparties grâce à notre système d’accréditation. Une fois dans ces bulles, elles n’avaient pas l’autorisation d’en sortir. » Trois niveaux de vulnérabilité face au risque Covid ont été identifiés.
La bulle « coureurs ». C’est celle qui avait la vulnérabilité la plus importante. Elle comprenait 800 personnes environ : les coureurs, le staff des équipes et tous ceux qui étaient amenés à travailler près des coureurs (commissaires, chauffeurs et motards en course…).
Pour les personnes de cette première bulle, quatre tests Covid-19 étaient obligatoires :
- un premier test réalisé cinq jours avant d’arriver à Nice, ville de départ du Tour;
- un deuxième deux jours avant le départ de la compétition;
- et deux autres programmés les 7 et 14 septembre.
« Ces personnes ont vécu en vase clos. Elles ne pouvaient pas rencontrer les journalistes comme habituellement, ni aller dans les zones protocolaires… Et inversement, les personnes extérieures à la bulle ne pouvaient pas rencontrer les coureurs et leur staff », indique Florian Vuillaume.
La bulle n° 2. Elle concernait les près de 500 personnes qui pouvaient de temps en temps être à proximité de la bulle « coureurs » : les hôtes et hôtesses protocolaires et certaines personnes de l’organisation. Elles ont effectué trois tests Covid, un avant le Tour et deux pendant.
La bulle n° 3. Elle comprenait le reste des accrédités, soit environ 2 000 personnes, qui ont toutes été testées cinq jours avant le retrait de leur accréditation. « Pour elles, il n’y a pas eu d’autres tests pendant le Tour de France, sauf si elles étaient symptomatiques. Dans ce cas, une procédure, valable pour tous, était alors appliquée : test, contact tracing, isolement si le test était positif, nouveau test à 2 jours puis à 5 jours… »
Des scénarios différents selon les régions traversées
En fonction des lieux où passait le Tour de France, trois scénarios s’appliquaient aux spectateurs dits stagnants, c’est-à-dire ceux qui se trouvaient sur les sites de départ et d’arrivée des étapes. Trois zones étaient donc identifiées :
- une zone rouge qui imposait un « huis clos », c’est-à-dire sans spectateurs sur les zones de départ et d’arrivée ;
- une orange qui acceptait les spectateurs à condition de respecter la norme d’une personne pour quatre mètres carrés ;
- et une zone verte avec un spectateur par mètre carré.
« Sur le parcours lui-même, nous avons simplement imposé au public le port du masque. Nous avions mis en place une campagne de communication sur les radios et la télévision pour en informer les spectateurs. Nous avions également trois véhicules “stop-Covid” qui circulaient deux heures avant la caravane publicitaire et avons distribué tous les jours 5 000 masques en tissus au départ, 10 000 masques sur le parcours et 5 000 à l’arrivée. Au total, nous avons donné près de 350 000 masques en tissus portant le logo Tour de France et environ 250 000 masques en papier. L’opération a été réussie puisque 90 % des gens portaient un masque », se félicite l’organisateur. Il précise également que 2,5 tonnes de gel hydroalcoolique ont été distribuées sur le bord des routes.
Tout le long du parcours, le port du masque était imposé au public. Ici, la caravane publicitaire lors de la 20e étape du Tour de France 2020 : Lure/La Planche des Belles Filles.
Un dispositif étoffé
« On adaptait notre dispositif tous les jours en fonction des seuils d’incidence en place dans les départements ! », poursuit-il.
Une brigade Covid d’ASO d’environ 70 personnes était dédiée au protocole sanitaire. Elle avait notamment la charge de l’ensemble de la signalétique destinée aux personnes en situation de travail et aux invités. « Et, en plus de la préventrice du groupe ASO qui gérait les risques courants (incendie, chutes de hauteur…) et des six pompiers qui sont présents sur le Tour de France, nous avions cette année une préventrice additionnelle qui veillait au bon respect des consignes sanitaires », précise notre interlocuteur.
« Tout a bien fonctionné »
In fine, chacun ayant vécu dans sa bulle et ayant respecté les gestes barrières, l’organisation n’a déploré durant les 3 semaines qu’une douzaine de cas positifs au Covid-19 sur 3 500 personnes, dont un seul cas symptomatique. « Notre inquiétude était surtout portée sur le soir dans les hôtels. Nous craignions un relâchement. Mais les gens ont été exemplaires. »
Concernant la caravane publicitaire, le protocole sanitaire était exigeant. « Et nous avions imposé des mesures restrictives, par exemple les arrosages d’eau pour désaltérer le public étaient interdits. Nos partenaires se sont parfaitement appropriés les mesures Covid, ils se sont adaptés sur la communication, les animations… Et c’est aussi pour cela que tout a bien fonctionné », se félicite Florian Vuillaume.
Martine Porez – Journaliste
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