Attentat : le débat sur l’anonymat des terroristes relancé

20 mars 20194 min

Deux ans après une consultation politico-médiatique en France, la question sur l’anonymat des terroristes dans les médias est de nouveau posée.
C’est cette fois-ci en Nouvelle-Zélande que le débat resurgit, suite aux attaques terroristes contre deux mosquées à Christchurch le vendredi 15 mars 2019.

50 morts et autant de blessés… Tel est le bilan de l’attaque terroriste perpétrée contre deux mosquées à Christchurch (Nouvelle-Zélande) le vendredi 15 mars 2019. L’assaillant, un Australien de 28 ans porté par des convictions d’extrême droite, a filmé l’intégralité des dix-sept minutes de son massacre.

C’est d’ailleurs à l’intérieur de celles-ci que l’intéressé a expliqué les raisons de son passage à l’acte. En amont de son geste, il a ainsi confié qu’il refusait « le remplacement racial et culturel de la population européenne ».

Le gouvernement souhaite un anonymat des terroristes

Entre l’élan de solidarité local et l’indignation internationale, le gouvernement néo-zélandais est monté au front par la voix de Jacinda Ardern. La première ministre néo-zélandaise de 38 ans a ainsi annoncé qu’elle n’entendait pas prononcer le nom de l’auteur de ce double attentat.

Présente devant les parlementaires à Wellington, elle a notamment fait comprendre qu’elle ne participerait pas à la mise en lumière médiatique d’un individu dont le seul fait d’arme reste cet acte de barbarie. Jacinda Ardern a en outre appelé un maximum de personnes à privilégier cet anonymat des terroristes, afin de se concentrer sur celles qui méritent l’attention dans ces heures sombres… À savoir les victimes de ce double attentat de Christchurch et leurs proches.

« Par cet acte terroriste, [l’assaillant] recherchait beaucoup de choses. L’une d’elles était la notoriété. C’est pourquoi vous ne m’entendrez jamais prononcer son nom. C’est un terroriste. Un criminel. Un extrémiste. Quand je parlerai, il sera sans nom. Je vous implore : prononcez les noms de ceux qui ne sont plus plutôt que celui de l’homme qui les a emportés », a ainsi déclaré Jacinda Ardern, relayée par Challenges, dans les heures qui ont suivi cet attentat contre deux mosquées de Christchurch.

La France pionnière sur l’anonymat médiatique des terroristes… ou presque

Cette prise de position de la première ministre néo-zélandaise n’est pas sans rappeler des faits similaires ayant eu lieu en France au cœur de l’été 2016. Dans la foulée de l’attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray (un mort et quatre blessés), qui faisait lui-même suite à l’attentat du 14 juillet de Nice (86 morts et 458 blessés), la question de l’anonymat des terroristes battait son plein.

Des personnalités politiques aux responsables de presse, en passant par une pétition en ligne signée par plus de 100 000 personnes… Cette question d’anonymat médiatique n’a laissé personne indifférent à l’époque dans l’Hexagone. Sans que cela ne fasse pour autant changer les choses dans les rédactions françaises.

Le quotidien La Croix, à l’époque un brin plus modéré que Jacinda Ardern, avait par exemple annoncé son intention de ne citer que l’initial du prénom et le nom des futurs assaillants. Le Monde avait pour sa part assuré qu’aucune photo de terroriste n’illustrerait les futurs sujets sur ce domaine.

Force est de constater que certains médias n’ont pas véritablement respecté leurs propres engagements. Lors de l’attentat du Super U de Trèbes (en mars 2018), La Croix n’avait ainsi pas hésité à citer le nom de l’assaillant. Idem concernant l’attentat de Christchurch du 19 mars dernier. Contrairement à La Croix, Le Monde a maintenu sa politique interne instaurée en 2016 sur l’anonymat des terroristes.

Une nouvelle législation souhaitée sur le port d’armes

En attendant de savoir ce qu’il restera de cet anonymat médiatique des terroristes en Nouvelle-Zélande, la première ministre a d’ores et déjà annoncé que des mesures à très court terme seraient prises sur le port d’armes.

« Je peux vous dire une chose, nos lois sur les armes vont changer. Le simple fait (…) que cet individu ait acheté un permis et acquis des armes de ce type, cela me fait dire que les gens vont vouloir que cela change. Et je m’y engage», a conclu Jacinda Ardern à travers des propos repris par le Huffington Post. Un accord entre les principaux partis politiques a d’ores et déjà été trouvé en ce début de semaine. Cela en vue d’une modification imminente de la législation.

Jusqu’à présent, en Nouvelle-Zélande, il suffit d’être âgé de 16 ans minimum et d’avoir suivi des séances d’instructions de sensibilisation et de sécurité pour demander un permis de port d’armes. L’âge minimal requis passe à 18 ans pour les armes semi-automatiques.

Eitel Mabouong

Eitel Mabouong

Journaliste

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